Du Maroc à l’Afrique du Sud, les artistes prennent l’ascendant sur la musique mondiale en s’imposant comme une source d’inspiration porteuse d’innovation. Ils s’affranchissent des règles et maîtrisent l’hybridation des genres en mélangeant afrobeats, hip-hop, dancehall, musique traditionnelle…
Du nouveau hit à la sauce afrowave de Didi B, jusqu’au rap façon coupé-décalé de NÔJ, voici un tour d’horizon du foisonnement créatif qui secoue l’Afrique en ce mois de juin.
Didi B – Puissant feat. Afro B
Le leader de Kiff No Beat, Didi B, nous donne sa définition de la puissance sur une production chaloupée signée Team Salut. Le trio britannique aux multiples hits, dont Joanna, récidive aux côtés d’Afro B. De la force tranquille du porte-étendard de l’afrowave (mélange de hip-hop, dancehall et afrobeat) au flow plus agressif de Didi B, le morceau transpire l’aisance puissance 1000.
Tawsen – Safe Salina
L’artiste installé entre la Belgique, l’Italie et le Maroc, a mis à jour son hit Safe Salina en le mariant à d’autres scènes de la nouvelle génération avec un EP trois titres : Safe Salina : The remixes. Ainsi retrouve-t-on une version mettant à l’honneur l’Italie avec le rappeur de Modène Ticky B, le Maroc avec El Grande Toto et Manal, et un remix qui invite deux artistes nigérians, Oxlade et Reybekah. Tous sont parvenus à apporter leur identité sur le morceau de Tawsen dont le refrain résonne toujours aussi puissamment. Celui qui est inspiré par Rosalia et dont on avait dressé le portrait, décline son morceau en intégrant, en arrière-plan, des éléments qui font écho au patrimoine musical des invités. Avec notamment la tabla traditionnelle pour le Maroc et de la trompette pour le Nigéria.
NÔJ – Binguiste
Accompagné par D14 et Kadja, NÔJ tourne en dérision les binguistes qui leur volent la vedette auprès de la gent féminine. Issu du Nouchi, un argot présent en Côte d’Ivoire et en Afrique de l’Ouest, ce terme désigne les Ivoiriens qui vivent ou ont vécu en Occident. Reprenant des éléments rythmiques du coupé-décalé, ce morceau porté vers l’enjaillement et teinté d’humour prouve encore l’influence durable de ce style ivoirien sur les productions actuelles.
Loun – Tnaket
Dans son dernier clip, Loun rappe à travers des personnages célèbres, de Napoléon à Kim Jong-Un ou l’humoriste américain Kevin Hart, pour établir un simple constat : tout est foutu (traduction de Tnaket). L’instrumentale est parcourue par une mélodie froide et aigüe qui lui donne un côté futuriste et alarmiste. Dessus, le rappeur marocain multiplie les flows toujours plus impressionnants, parvenant à nous happer dans son univers de la première à la dernière seconde.
Rema – Alien
Une semaine après Ginger Me et un mois après sa superbe prestation pour Colors, Rema s’envole dans une atmosphère céleste avec Alien. Révélé avec le morceau Dumebi issu de son EP Rema sorti en mars 2019, l’artiste nigérian ne cesse d’élargir son univers au fil des singles. Cette fois-ci, il offre un titre stellaire porté par un piano langoureux et une flûte envoûtante. Le tout magnifié par une grande maîtrise de l’autotune et des filtres pour varier ses textures vocales jusqu’à devenir un Alien.
Sarkodie – Brown Paper Bag (feat. M.anifest)
Figure incontournable et multirécompensée du rap ghanéen, Sarkodie s’est allié à son ex-rival, M.anifest, reconnu pour sa plume. Profondément engagé, ce titre traite de la condition des noirs, de l’esclavage au néocolonialisme, le tout porté par un visuel qui met en image les luttes pour la reconnaissance de leurs droits. Puissant dans le propos, le morceau l’est également dans sa composition aux percussions prépondérantes, ponctuées d’un sample de voix mélancolique. Les fondations idéales pour accueillir les flows vigoureux des deux MC’s qui, à travers cet effort de revendication, honorent l’héritage du hip-hop.
Moro – Patera 2
Depuis le début de l’année, le rappeur marocain Moro a pris l’habitude de sortir deux/trois morceaux par mois accompagnés d’un visuel. Cette fois-ci, c’est plutôt une animation 3D qui donne de la résonance à « Patera 2 ». Les patera désignent les bateaux de fortune utilisés par les immigrants clandestins. Une situation que Moro aurait vécu pour arriver en Europe… Le morceau sample un oud, rythmé par une batterie entraînante. Poursuivant un sans-faute, Moro continue de faire parler l’expérience avec une technique chirurgicale.
Breeder LW x Khaligraph Jones – Ni Kubaya
Sample de flûte = banger ? L’analogie paraît trop facile, mais elle se vérifie souvent. En tout cas, le rappeur Breeder LW est parvenu à la même conclusion avec son nouveau titre, « Ni Kubaya » (« c’est mauvais » en swahili) en featuring avec Khaligraph Jones. Cette tête d’affiche du rap kenyan prend le relais du morceau avec un couplet explosif, augmentant la pression au fil des mesures. Ni Nzuri (c’est bon en swahili) !
Yemi Alade – Boyz
Yemi Alade, a dévoilé le clip du premier extrait de son cinquième album. De retour après l’album Woman of steel, qui parlait à la fois de corruption politique et de pouvoir féminin, l’artiste nigériane sait pertinemment comment faire bouger les corps. Mariant son afrobeats aux couleurs d’un dancehall plutôt pop, elle clame son désir à l’égard des « boyz » dans ce tube de l’été !
Retrouvez l’interview de Yemi Alade.
Nasty C x DJ WHOOkid – I’m Sorry
On vous parlait récemment du nouveau titre engagé de Nasty C, en featuring avec T.I., et dont les bénéfices sont reversés à des associations. Et bien l’artiste sud-africain l’a intégré à sa nouvelle mixtape, Zulu, disponible gratuitement depuis le 24 juin et produite par DJ Whoo Kid, une légende du hip-hop qui a collaboré avec Mobb Deep, 50 Cent ou encore Skepta. On y retrouve « I’m Sorry », une balade onirique et mélancolique façon trap déjà publiée en version live, et désormais accessible dans une version audio de meilleure qualité. Le jeune rappeur offre une introspection portée par interprétation touchante. Le résultat est saisissant.