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Les planètes s’alignent pour Foreigner et le collectif Moonshine
Foreigner lors du Junkyard Jouvert! en 2019 - Photo: Patrick Struys

Les planètes s’alignent pour Foreigner et le collectif Moonshine

À Los Angeles comme à Montréal, les évènements organisés par Foreigner et le collectif Moonshine sont un concentré de fête et de culture afro-caribéenne. Alors quand le destin s’en mêle et provoque la rencontre… Pour PAM, Hervé « Coltan » Kalongo et Foreigner reviennent sur un travail d’équipe exaltant, en particulier sur la nouvelle mixtape du crew, SMS for Location, Vol. 3

Rappeler à Adam Cooper alias Foreigner que les voyages forment la jeunesse sonnerait comme une provocation. Né à Trinidad et Tobago, il passe une bonne partie de son enfance au Venezuela avant de déménager à New York pour y vivre ses années étudiantes. Contraint de retourner au pays par manque d’opportunités professionnelles, il décide plus tard de mettre les voiles pour Los Angeles pour raison sentimentale, sans savoir ce qu’il allait y trouver d’autre. Ses valises fraîchement posées, il réalise vite le potentiel qui se dessine sous ses yeux : « L.A. m’a offert une belle culture d’entrepreneuriat, de créativité, d’expérimentations, et une carte blanche pour faire ce que mon cœur me dictait. »

Foreigner à Los Angeles – Photo: Azah Ayanna

En 2018, il découvre que l’un de ses clubs de prédilection possède aussi une énorme décharge en plein air. Pas besoin de lui dire deux fois : « j’ai immédiatement eu l’idée d’organiser les soirées Junkyard Jouvert, et aujourd’hui, les gens adorent cet évènement fou à L.A. ! » Dans ces nuits enflammées, la sueur se mélange à la poussière multicolore sur les meilleurs sons afro-caribéens et électroniques du moment. Los Angeles a beau être une référence mondiale en termes d’avant-garde électro —  le label Brainfeeder en tête —  le genre afro y reste néanmoins sous-représenté selon lui : « il y a toujours une forte présence africaine et caribéenne ici, remarque Foreigner, mais il est difficile de trouver des choses en rapport avec cette culture. Ça n’est pas comme à New York, ou tu peux trouver un super club ou un restaurant africain au coin de la rue. »

 Objectif Lune

En médiateur, Adam devient vite ce trait-d’union entre un public qui ne demande que ça et une scène discrète à la recherche d’un véritable ambassadeur. « J’essaie de rendre cette musique accessible aux gens d’un point de vue logistique et conceptuel. La culture, le divertissement afro-caribéens et ses nuances sont particulièrement étrangers aux habitants de L.A. Je veux rendre les choses plus simples, sans en trahir l’essence. » Pour Foreigner, le pari devient vite une réussite, sans compter qu’un peu plus au Nord, le vent a soufflé ses exploits jusqu’à Montréal dans les oreilles du collectif Moonshine.

Hervé Kalongo est né au Congo. Il a commencé à explorer la musique en arrivant à Montréal, avec le chanteur Pierre Kwenders et d’autres copains d’enfance. Ayant étudié le marketing à l’école, il essaie d’abord de mettre ses connaissances théoriques au service du son produit par ses potes : « il y a tellement de choses à faire à Montréal quand il s’agit de représenter un paysage musical, et c’est grâce à ça que Moonshine est né. » Soirée après soirée, le crew concilie DJ talentueux, travail visuel et concepts originaux, devenant alors incontournable lorsque l’on parle de clubbing et de musique électronique africaine ou diasporique à Montréal. 

A ce moment, 4500 kilomètres séparent donc deux entités qui, chacune de leur côté, apporte quelque chose de frais et d’important à sa scène locale. C’est un ami mutuel habitant à L.A. qui leur servira d’étincelle en arrangeant un premier contact, persuadé qu’une alchimie pouvait naître. Intrigué par la réputation et la polyvalence du personnage, Hervé contacta immédiatement Foreigner, et c’est ainsi que, le plus naturellement du monde, Moonshine posa son sound system à L.A. pour une première soirée commune. Foreigner explique : « cet ami savait que Moonshine amenait toujours des percussions live ouest-africaines dans leurs soirées, en plus d’avoir des DJ et un rapport avec la diaspora africaine. Quand mon pote a assisté à l’un de mes évènements, il a aussi vu que j’avais invité le Laventille Rhythm Section de Trinité-et-Tobago. » Bien qu’anecdotique en apparence, cette affinité lui est apparue comme une évidence : « les rythmes sont très distincts, mais appartiennent à l’univers rythmique de la diaspora. Cela a rendu les choses plus faciles, car nous parlons le même langage rythmique, même si nous venons de pays différents. »

Foreigner et Hervé « Coltan » Kalongo sur la terrasse du Perch au centre-ville de L.A. en mars 2019
Regards croisés 

« Je blague toujours quand j’appelle Adam le LeBron James de nos évènements, il sait tout faire, plaisante Hervé Kalongo depuis Montréal. Il possède une vision à 360° quand il s’agit de créer. » Hervé avoue aussi que leurs premiers échanges sur les réseaux sociaux ont été déterminants, tant Foreigner répondait à tout avec les pieds sur terre, malgré la fantaisie qui transpire de ses projets. « On s’est tout de suite dit, essayons de collaborer sur quelque chose, continue Hervé, peu importe si on fait de l’argent ou non. C’est pour ça que nous avons créé cette plateforme, pour être capable d’entrer en contact avec d’autres personnes et montrer au public montréalais ce qu’il se passe ailleurs musicalement. » Tout autant emballé par l’état d’esprit Moonshine, Foreigner renvoie les compliments à Hervé : « ce sont les meilleures personnes, ils sont sympas, chaleureux, drôles, mais ils représentent aussi le meilleur collectif de musique électronique africaine que tu puisses trouver. Ils gèrent leur business avec une pure intégrité ». 

L’équipe ne fait pas semblant lorsqu’elle décide d’organiser un évènement : musique pointue, films, arts plastiques, design, ligne de vêtements, chaque composante artistique en appelle une autre. « C’est presque comme un show Netflix, dit Adam. Ces gens sont des amis solides, avec une vision commune. C’est cette amitié qui leur permet de réellement expérimenter, essayer, être d’accord ou en désaccord, ajuster, réessayer… C’est pour cela que Moonshine porte un message clair d’un point de vue philosophique. »  Depuis cinq ans, chaque samedi qui suit la pleine Lune, le collectif propose un rassemblement dans un lieu secret et insolite, et il vous faut envoyer votre numéro de téléphone pour obtenir l’adresse. « Pendant les trois premières années, je donnais mon propre numéro, dit Hervé, dépassé par le succès du concept. Ça commençait à devenir difficile à gérer le week-end ! Félix a donc développé cette application pour qu’on puisse répondre correctement et à l’heure. » Cette série de soirées qui a démarré très localement a aujourd’hui pris une ampleur internationale, dépassant la vague globale de musique Africaine grâce à son côté alternatif. « Nous jouons plus de Gafacci que de Burna Boy », confirme Hervé, fier d’avoir lancé cette série de mixtapes qui leur sert de vitrine.

Foreigner, Uproot Andy et Hervé Kalongo à New York en septembre 2019
Une mixtape qui se regarde 

D’un côté comme de l’autre, la soif d’expérimentations est palpable. Hervé confirme que dans un mouvement perpétuel, Moonshine se nourrit du travail de Foreigner, et inversement, sans jamais chercher à se copier. « Quand ils m’ont demandé si je voulais travailler visuellement sur la mixtape, j’ai sauté sur l’occasion, se souvient Adam. Ils m’ont vraiment laissé explorer mon potentiel en tant qu’artiste pour créer quelque chose d’expressif et expérimental. En temps normal, j’ai une approche marketing des choses. Moonshine font ce qu’ils aiment, et si tu n’aimes pas, c’est ton problème ! » 

Le son associé à la vidéo, c’est de cette manière que Moonshine consomme la musique dans ses soirées : leur troisième mixtape SMS for Location a pour vocation de procurer une expérience similaire aux gens qui l’écouteront. Pour ce troisième chapitre qui réunit des artistes tels que Pierre Kwenders, Pedro ou Anderson MidNite, Moonshine a décidé d’ajouter une couche visuelle en faisant appel à Adam : « au début, nous n’étions même pas sûrs de ce que faisait Adam, s’étonne Hervé. Il est parfois DJ, parfois producteur, parfois derrière la caméra… Dans la mixtape, nous avons des artistes de différents pays, Adam a voyagé et vécu dans tellement de pays, c’est le mec parfait pour ce genre de choses ! » 

Face au cahier des charges initial qui consistait plus ou moins au travail d’un VJ, Foreigner a lâché les chevaux pour finalement inventer un clip par chanson. Ce qui ressemble à un collage foutraque de vidéos trouvées ici et là sur le net contient en fait bien plus de messages qu’il n’y paraît. « De la même manière que nous, confirme Hervé, Adam a une approche esthétique que n’importe qui en apparence serait capable de faire, avec une appli sur son téléphone. En fait, non ! Il y a bien plus de réflexion… » Pour illustrer leur propos, Adam et Hervé nous parlent de quatre vidéos qui ont tapé dans l’œil de PAM. Décryptage.

Merci & Marco – Evade

Foreigner : « Le background avec le jeu vidéo a surgi dans mon esprit quand j’ai pensé à mon travail et à celui de Moonshine, en particulier parce que ce que je fais est underground, ça n’est pas fait pour les clubs traditionnels. C’est un travail un peu risqué, et le jeu vidéo est là pour l’exprimer le fait que ce n’est pas un jeu, on est vraiment en train de le faire. J’ai ajouté cette couche avec cet homme noir qui essaie d’échapper à la police. C’est la chose la plus difficile au monde, spécialement aux Etats-Unis, il faut être surhumain ! Il y a ce mec dans la vidéo qui essaie de passer par-dessus la clôture, pour s’évader. Je n’ai jamais vu personne faire ça nulle part dans ma vie. Super Metroid est un classique sur Super Nintendo, que personne n’arrive vraiment à finir. Je ne connais personne qui a pu battre ce jeu ! Mais il y a quelques vidéos sur YouTube avec des mecs qui battent le jeu en une heure. Montrer l’intensité du jeu en fond d’écran, avec ces scènes surhumaines de gens en train de survivre à la police est une exploration cool du mot « Evade », liée au travail que Moonshine et moi réalisons.»

Hervé : « La chanson a été faite par Merci & Marco, du Chili. Je me souviens qu’au moment où on discutait de la mixtape, il y avait toutes ces manifestations à Santiago. La manière dont Adam a fait la vidéo peut aussi représenter la lutte que les Chiliens vivaient au même moment. Je ne sais pas si Adam fait la connexion mais la tournure qu’a pris cette vidéo est astucieuse ! »

Foreigner : « Je n’ai pas fait la connexion mais ce genre de coïncidence arrive souvent quand je travaille avec Hervé et Moonshine. Tout s’aligne spirituellement et philosophiquement, ça fait partie des plaisirs de bosser avec Moonshine. »

Nate Husser & Dapapa – are you stoopid (dumb)

Adam : « J’ai pensé à cette épicerie, car la chanson parle à un moment d’aller au magasin pour acheter des trucs. Cette scène de 7 Eleven est juste réminiscente au process d’avant-fête. Il y a une forte luminosité, il y fait froid, tu prends ta bouteille d’alcool, ton Red Bull, tu te prépares. Puis la folie commence, dans un lieu sombre et bruyant. Je voulais donner un feeling un peu fou avec la vidéo de cette fille qui danse sur la tête de ce mec au Panama (rires). C’est une chanson festive, et je voulais montrer la progression de l’avant-match à la folie. Je pense que j’ai réussi à le faire avec cette vidéo ! »

DJ P2N feat. DJ Boyoma – Mosapi

Foreigner : « C’est la première vidéo que j’ai faite. Pour moi, P2N représente un épisode vraiment cool du show Netflix de Moonshine, saison 2, épisode 3… (rires) Quand je suis venu à Montréal en août 2019, j’y suis resté pour environ une semaine, j’ai mixé à une soirée, puis nous sommes allés au festival Osheaga, c’était une belle semaine d’été. Lors de la soirée, Pierre Kwenders et Bonbon Kojak m’ont introduit à P2N et MC Redbull, qui sont tous les deux congolais

Hervé : « Ils font partie de cette nouvelle vague de producteurs et MCs congolais, qui diffusent leur musique principalement par Whatsapp. »

Foreigner : « Leur musique est chaude ! Quand j’ai entendu ça, je me suis dit que j’avais besoin de tout leur son. Je n’ai pas été surpris en voyant P2N sur cette mixtape. Naturellement, j’ai donc commencé par ce morceau, et j’ai juste ressenti de la vitesse, j’avais envie de conduire rapidement. La vidéo de fond est tirée du film C’était un Rendez-vous. C’est comme un voyage à grande vitesse dans Paris tôt le matin. Ça s’arrête quand le mec rencontre une femme dans un parc. La vitesse et l’aspect de la vidéo m’ont rappelé mes expériences à Paris avec Moonshine. Il y a aussi ces clips avec un gars sur une moto en Jamaïque. Cette moto ressemble à celle qui se fait chasser par un taureau dans la station-service. C’est simplement une exploration de tout cela. »

Coco Em – Emma’s Wisdom

Hervé : « Cette vidéo était dans le haut de ma liste. Elle est super puissante. Je ne sais pas comment Adam a sorti ça, mais quand je montre la série de vidéos à d’autres personnes, je commence toujours par celle-là, car la plupart des gens ne comprennent pas, ils lâchent l’affaire, et ils ne savent pas ce qui se passe. Juste entendre Coco Em parler de la condition gay et queer au Kenya, tout en voyant ces gens entrer en transe… J’adore. »

Pour écouter et acheter la mixtape à prix libre, rendez-vous sur Bandcamp ou la plateforme de votre choix. Vous pouvez aussi envoyer un SMS au +1 514 612 4859 pour recevoir un lien de téléchargement.

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