Dans son nouveau clip, la Néo-Zélandaise aux racines camerounaises tente d’esquiver un ballon de basket en jouant de la batterie. Un sens de la métaphore décalé à l’image de sa vision de la pop. Interview.
Autrice d’un premier album éponyme sorti en 2015, Estère a immédiatement été encensée, grâce à un instinct créatif inné qu’elle laissait courir en liberté sur sa MPC jusqu’au milieu de la nuit, dans sa chambre d’étudiante. En apesanteur entre R’n’B, folk et électro, Estère est aussi à l’aise derrière un micro qu’avec un sampler dans les mains, captant des sons de synthé, de basse ou de bruits de tiroirs. Son style qu’elle appelle elle-même Electric Blue Witch-Hop a pris forme sur un second album en 2018, intitulé My Design, On Others’ Lives, qui lui a offert une place sur scène en première partie de ses idoles Grace Jones ou Erykah Badu. Sur son nouveau single « Calculated Risk », elle part du principe que la vie est périlleuse par nature, mais que la prise de risque finit toujours par payer… D’un air pince-sans-rire, elle chante sa crainte de l’échec assise derrière une batterie au milieu d’un match de basket, avant de finir en tutu au bord d‘une falaise.
Quel est le message à retenir dans ce single ?
Ce single parle de moi, de ma peur de me rendre vulnérable à l’échec. Ces « barrages dans mes veines » dont je parle dans ma chanson, ce sont les doutes profonds qui peuvent m’empêcher de me mettre en danger parce que je ne veux pas me retrouver brisée.
Dans quel contexte l’as-tu écrit ?
J’ai écrit cette chanson quand j’étais en tournée solo en France. Je passais beaucoup de temps seule dans les trains, ce qui m’a donné le temps d’être très introspective sur les raisons pour lesquelles je craignais l’échec. J’ai commencé à penser à de nombreux mythes -certains vieux de plusieurs milliers d’années- en rapport avec le thème de la destruction. Par exemple, l’histoire d’Eve dans le jardin d’Eden, l’histoire de Perséphone et de la grenade, la boîte de Pandore, Lilith, la liste est longue. Une grande partie de cette iconographie mythique s’est retrouvée dans la chanson et le clip vidéo de « Calculated Risk ».
Quelles sont les principales évolutions entre tes nouvelles chansons et tes deux précédents albums auto-produits ? Es-tu toujours dans le mode DIY qui te caractérisait ?
Ce nouvel album était beaucoup plus collaboratif, c’est l’une des principales évolutions. Je suis devenue suffisamment à l’aise avec moi-même pour reconnaître mes propres instincts, et j’anticipe plus facilement. J’avais peur de perdre ma perspective si je confiais une partie de la direction artistique à quelqu’un d’autre. Cet album a été coproduit avec Stew Jackson, qui a travaillé avec Massive Attack, et de nombreux musiciens sont venus jouer lors des sessions d’enregistrement. Ce fut un réel plaisir de travailler avec d’autres musiciens, car cela a élargi ma propre compréhension du champ des possibles, d’une façon nouvelle et passionnante.
Ton album Archetypes sortira à la fin de l’année. A quoi peut-on s’attendre en termes de musique et d’histoires ?
Des paysages et des textures sonores luxuriants, des mélodies de guitare intéressantes, des tambours percutants et beaucoup d’harmonie ! Des histoires d’amour, de mort, de maternité, de peur, d’enfance et de désir sexuel sont également présentes sur l’album. J’ai hâte que les gens l’entendent !