Jupiter et son groupe Okwess révèlent le clip de « Na Kozonga », premier extrait de leur album à paraître début 2021. Réalisé par Florent de la Tullaye (Staff Benda Bilili), il nous embarque dans un retour au pays de l’étrange, au pays des ancêtres.
« Na Kozonga », je rentre. C’est le titre du prochain album de Jupiter et Okwess, mais aussi de ce single clippé qui vient de paraître. Rentrer, c’est aussi le souhait profond de Jupiter, qui après les 180 concerts qu’il aura donnés dans le monde entier après la parution de son précédent album (Kin Sonic, 2017), n’avait qu’une envie, rentrer au pays de ses ancêtres, d’où il tire depuis toujours son inspiration. C’est d’ailleurs entre deux tournées que ce clip a été tourné, à Kinshasa. Ensuite, Jupiter s’est envolé pour Paris, et y est resté coincé par le confinement et la fermeture des frontières. « Na Kozonga », ces mots prononcés trois mois après n’en prennent que plus de force. Mais c’est certainement le clip réalisé par Florent de la Tullaye qui éclaire tous les sens symboliques que l’expression recèle pour lui.
On y voit Jupiter monter à bord d’un avion d’époque zaïroise, accueilli par les membres d’Okwess qui font l’équipage, les passagers, et sa garde rapprochée. C’est le retour au bercail, dans la famille où Jupiter raconte ses aventures autour du monde. Tout le monde est captivé, y compris Tata Bokondji, le père du chanteur.
Jusqu’ici, tout va bien pourrait-on dire, d’autant que la musique, entraînante et entêtante, laisse planer sur ce retour le plus grand optimisme (certains auront sans doute reconnu l’air popularisé par Boney M que reprend « Na Kozonga »). Mais en sortant de chez lui, Jupiter entre dans un monde qui a basculé, où l’étrange et le surnaturel envahissent les rues de son quartier. Des visages blanchis au kaolin l’observent et semblent le suivre. Les esprits des ancêtres ? dans une boîte de nuit, une femme léopard, enceinte, l’invite à danser… mais sous sa beauté se cachent les traits d’un esprit ! Jupiter fuit, et se réveille dans la forêt où des enfants aux lunettes végétales l’invitent à le suivre… jusqu’au fleuve, majestueux. C’est là que l’attend une sirène.
Florent de la Tullaye*, le réalisateur, explique :
« Ce sont des enfants qui montrent le chemin jusqu’à Mami Wata qui se trouve dans le fleuve Congo. Elle est une créature centrale des mythes congolais. Elle est perçue comme inquiétante en Afrique, tout comme les sirènes en Occident. Mais contrairement à Ulysse, Jupiter choisit de se laisser entraîner par elle et disparaître. »
Jupiter, quant à lui complète : « Il y a le retour à la maison, en famille. C’est le retour physique. Mais le vrai retour, c’est la mort, le retour éternel. La mamy wata m’emmène dans l’eau : elle me libère des gens qui veulent s’accrocher à moi ou qui profitent de moi. Partir, c’est ma liberté. On est mort le jour où on est né. »
On l’aura compris, le clip « Na Kozonga » est bourré de symboles qui parlent à l’imaginaire congolais. Mais aussi sans doute à toutes les diasporas, quand on sait que du Brésil à Cuba en passant par la Colombie ou Haïti, la figure de mamy wata a résisté au temps. Combien sont-ils sur ces terres lointaines qui rêvent d’un retour à l’Afrique ? « Na Kozonga » certainement les interpellera. Enfin, et c’est plus personnel, le clip est dédié à Tata Bokondji, le père de Jupiter, qui apparaît pour la dernière fois en compagnie de son fils. Car le Vieux est décédé début juin, tandis que Jupiter et Okwess étaient coincés à Paris. De quoi donner encore un peu plus de force à la chanson, et au désir de rentrer formulé par Jupiter : na kozonga.
*En 2006, Florent de la Tullaye et son compère Renaud Barret avaient consacré un documentaire au leader d’Okwess baptisé « La Danse de Jupiter ».