Plus besoin d’expliquer, pour nous, en quoi la chanteuse malienne est une battante. Ça tombe bien, Oumou Sangaré elle non plus n’a plus besoin de le démontrer. Juste d’exister, à la ville comme à la scène, avec sa disponibilité et son franc parler. Et d’illuminer les visages des gens – ceux d’Arles et d’ailleurs, quand elle laisse s’envoler sa voix. Mais avant d’assister à son concert, en juillet dernier, PAM avait profité des balances, dans un théâtre antique écrasé de chaleur, pour un brin de causerie avec la chanteuse, à quelques heures de son entrée en scène.
Assise sur un vénérable bloc de pierre, à l’ombre des arbres, elle a donc patiemment répondu à nos questions, et fait la lumière sur le sens de ses chansons qui, pour les non-bambaraphones, méritent quelques explications. « Gniani Sara », qui évoque la force des femmes et les encourage non seulement face aux difficultés du quotidien, mais aussi face au manque de reconnaissance dont elles font un peu partout les frais. « Wassoulou Don », issu de son dernier album, qui chante la beauté et les richesses du Wassoulou, un terroir qui lui est cher et qu’elle a décidé de mettre en valeur en y organisant chaque année le FIWA, le festival international du Wassoulou. Enfin, il y a « Kele Magni » – la guerre, le conflit.. sont néfastes. Et en ces temps de conflits chez elle, et de crispations entre les gouvernements français et maliens, dont les relations sont tendues depuis de longs mois, la chanson prend tout son poids.
Quand Oumou Sangaré en parle, on la sent émue et un peu irritée : « les politiciens ont intérêt – on leur demande même pas – ils ont intérêt à trouver la solution, et tout de suite (..) parce que les peuples français et malien vivent ensemble comme si de rien n’était » martelait-elle en juillet, prenant les accents et la hauteur d’une griotte, qu’elle n’est pourtant pas, pour inviter les dirigeants des deux pays à se réconcilier. Depuis notre rencontre au festival les Suds, les choses ne se sont guère arrangées au sommet des deux États. Mais on la sent capable, sur ce sujet, de ne rien lâcher, et de continuer à répéter inlassablement le même message, partout où elle se produit : kele magni, le conflit n’apporte que le malheur, a plus forte raison entre de si vieilles connaissances.
On vous laisse apprécier dans cette vidéo (réalisée par Florent de la Tullaye), non seulement la force de ses mots, mais la puissance de sa musique, qui sait transformer les frustrations et les jours tristes en fête et en esprit positif. Décidément, la grande dame qui n’eut pas la vie facile, commençant par chanter dans la rue pour vendre de l’eau, est une femme à suivre. C’est bien ce que nous essayons de faire sur PAM, tant elle nous inspire.