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The Pan African Music Magazine
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Le Maroc synthétique d’Omar EK
Omar EK © Amine Oulmouddane

Le Maroc synthétique d’Omar EK

Enfant du Maroc immigré à Lille, Omar EK matérialise ses racines sous un angle house et new wave, à mi-chemin entre les trouvailles rétro-futuristes d’Habibi Funk et la french touch d’Ed Banger.

À l’automne dernier, la Cave aux Poètes de Roubaix accueillait le rock touareg de Kel Assouf et les fusions afro-club de Mawimbi. En bas de l’affiche de cette soirée tournée vers l’Afrique, on lisait le nom Omar EK, illustre inconnu venu proposer une première partie en mode solo machines. Sur la toile, pas l’ombre d’un album ou d’un single pour cet artiste émergent qui n’a pas peur de jouer des mélodies de chez lui sur des beats électro-funk, qui font parfois écho à Breakbot, Justice, Kavinsky ou même aux Daft Punk. C’est cette vidéo terriblement groovy tournée lors du Festival Tour de Chauffe qui a donné envie à PAM de capter le Casablancais sur sa première mini-tournée, entre Marseille et le Nord de la France.

Le couteau suisse de l’Atlas

« J’avais une sœur qui faisait un peu de musique, et moi j’étais plutôt un gros geek sur mes jeux vidéo », se souvient Omar en souriant. « Un jour, elle est partie et la chambre est devenue silencieuse… » Du désir de remplir cet espace vide naquit une passion musicale pour cet ado marocain qui remplaça progressivement sa console par la guitare de sa sœur : « je voulais la vendre mais un copain m’a dit qu’il m’apprendrait des trucs. J’avais 15 ans, j’avais aussi besoin d’apprendre à jouer, pour frimer un peu devant les potes…» Il apprivoise alors son instrument en traînant sur la scène punk et métal de Casablanca. « J’ai des goûts très volatiles qui changent tous les trois ans » avoue-t-il. « J’aime apporter de la fraîcheur à mes oreilles, même si le dénominateur commun reste l’Afrique.» Son instinct, son éclectisme et ses talents l’amènent naturellement à jouer pour des groupes de funk, d’acid-jazz, ou pour des big-bands locaux qui fusionnent la musique traditionnelle avec le reggae ou la salsa.

Live Sessions Tour de Chauffe 2020 / OMAR EK

Alors que sa guitare ne cesse de lui ouvrir des portes, Omar se sent au fond de lui -consciemment ou non- aimanté à ses racines, à ces musiques gnawas, aïssawa, regadda, et même touarègues, jusqu’aux frontières de l’Algérie et du désert. Entre deux sessions live, il aime manipuler les guembris et les différentes percussions de ses amis musiciens. De retour sur terre après chaque concert, la raison lui dicte de se concentrer sur ses études d’ingénieur en informatique, premier prétexte de sa téléportation sur le sol français. Il raconte, sans regret : « à ce moment-là, je n’étais plus certain de vouloir faire carrière dans la musique, mais quand j’ai terminé mes études, je me suis dit merde, je fais ce que je veux ! » Lui qui adore « aller chercher et comprendre les univers des autres » tente le makossa avec des camerounais, flirte avec des musiciens guinéens et partage la scène avec des Brésiliens qui lui ouvrent la porte des cultures lusophones au sens large. « Mes connaissances musicales se limitaient à l’Afrique du Nord », nous dit-il, « et ces musiciens m’ont complètement dépaysé ! »

Pour autant, cette surdose de musique ne suffisait pas à satisfaire les besoins de ce Lillois d’adoption, qui s’était jusqu’alors toujours « adapté pour faire de la musique au service des autres ». Son projet solo Omar EK est donc né en 2018 de la frustration du gars sans carnet d’adresses qui venait de débarquer dans une ville inconnue, et qui voulait jouer toujours plus longtemps, toujours plus fort.

Une douce vision de l’afro-futurisme

Sans aucun bagage technique en Musique Assistée par Ordinateur, le multi-instrumentiste se tourne vers les machines, solution sans doute la plus efficace pour fabriquer ce style singulier dont il n’avait encore aucune idée. « J’écoute beaucoup de musiques électroniques, influencée par la new wave des années 80, avec des boîtes à rythmes et un son un peu plastique », explique-t-il. « J’aime mélanger ce côté synthétique avec des musiques organiques africaines, c’est vraiment la musique afro qui apporte ce petit truc vivant à la musique électro. » En véritable autodidacte, Omar se forme à la MAO, sample ses propres instruments et les intègre dans sa musique, comme pour revendiquer ses racines. « Je ne sais pas si c’est bien ou pas bien, mais en tous cas c’est moi ! », plaisante-t-il. L’adolescent qui écoutait Khaled presque en secret se sent aujourd’hui libre à l’âge adulte de pouvoir s’assumer entièrement et enfin, de partager : « Au début, je ne jouais pas forcément beaucoup de musiques de chez moi, mais finalement c’est ce que je suis ! Je sens que c’est plus sincère, plus honnête et que ça claque plus. »

Omar EK – Houria

Il est vrai que sur scène, Omar El Khaldi a de quoi charmer un public large, avec ses lignes de basses funky, ses beats ronds et ses synthés organiques qui relaient la chaleur du Maghreb, à l’image de ce premier single « Houria » que l’on vous offre en avant-première. Pour le Marocain, il s’agit d’une forme de revendication d’une Afrique inscrite dans un modèle afro-futuriste. L’interprétation, à sa manière, d’une « Afrique indépendante, à travers cette esthétique douce qu’est la musique ». Partant du principe que les Africains n’ont besoin de personne au-dessus d’eux pour leur dicter ce qu’est leur terre, Omar traduit sa vision progressiste de l’Afrique dans une musique rétro-futuriste, élevant les continents au même niveau par le biais des synthés et des boîtes à rythme : « utiliser l’électronique est une façon de dire qu’on n’est pas des sauvages à jouer dans le sable, qu’on peut s’approprier les mêmes instruments et les jouer à notre façon sans singer personne ». Pour appuyer son constat, il cite le visionnaire Peter Gabriel, qui « disait dans les années 80 que les studios étaient chers et difficiles d’accès pour les Africains, mais que le jour où ils auront les machines entre les mains, le monde changera, et c’est ce qui se passe ! » Le jour de la démocratisation électronique est arrivé. Aujourd’hui, plus besoin d’avoir un studio conséquent pour enregistrer un disque, un coin de table et un ordinateur suffisent : « je me débrouille comme tous ces gens dans leur chambre, avec les moyens du bord. C’est de cette contrainte que naissent les belles choses ! » Doucement mais sûrement, Omar entend bien traduire sa formule live sur un EP qui verra probablement le jour à l’automne. Un personnage à suivre !

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Omar EK © Amine Oulmouddane
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