Descendant d’une grande lignée de griots, cousine de Toumani Diabaté comme de Ballaké Sissoko, la musicienne gambienne est l’une des rares femmes qui jouent de l’instrument.
Sona Jobarteh est la fille de deux écoles : celle des griots, incarnée notamment par son grand-père Amadu Bansang Jobarteh, et celles de la musique classique européenne qu’elle étudia dans sa jeunesse en Angleterre où elle est née. Mais à mesure qu’elle grandissait, la kora s’est imposée à elle. Aujourd’hui, elle est sans doute la seule femme qui fait carrière sur les scènes du monde entier avec cet instrument habituellement joué par les hommes. Elle au aussi fondé à Banjul, la capitale gambienne, une école pour former les jeunes koraïstes de demain. Interview express.
Comment s’est passé, pour toi, l’apprentissage de la kora ?
Je suis née dans une famille de griots donc la kora était déjà là : mon grand-père, mon père en jouaient déjà. Mon grand frère a commencé à me l’enseigner quand j’avais quatre ans. À l’époque, je ne jouais que de simples lignes de basse, mais comme je pratiquais aussi d’autres instruments (le violoncelle, la harpe), c’est adolescente que j’ai vraiment choisi de me concentrer sur la kora. Je suis donc revenue là où j’avais commencé, et j’ai commencé à travailler très dur vers l’âge de 17 ou 18 ans, en étudiant avec mon père l’ancien répertoire qu’il maîtrise parfaitement. C’est alors que j’ai véritablement commencé mon parcours de koraïste. Mais, comme je l’ai dit, l’instrument était dans mes mains bien avant que je ne prenne la décision consciente de m’y consacrer.
Être femme et joueuse de kora, comment cela est-il perçu en Gambie ?
Aujourd’hui c’est perçu généralement comme quelque chose de positif parce que ça attire l’attention des gens et réveille leur intérêt pour les traditions culturelles gambiennes. Le pays travaille dur pour développer son industrie musicale, donc tout ce qui peut aider à sensibiliser les gens en leur montrant notre culture musicale est positif, c’est ce que pensent la plupart des gens. Et puis il y a aussi le fait que moi, je ne joue pas dans le contexte traditionnel. Ma place a toujours été sur scène, ce qui est quelque chose d’assez récent pour nos traditions, mais ce nouvel environnement m’a justement permis d’être acceptée.
On dirait que la kora a été inventée pour calmer le cœur des gens, et y instiller la paix. Qu’en penses-tu ?
Je trouve ça intéressant que bien des gens parlent de la kora en ces termes : elle amène le calme et la sérénité, et je suis d’accord — pas seulement parce que c’est l’instrument dont je joue et que j’aime —, mais parce que je me suis rendu compte que beaucoup de gens qui l’entendent pour la première fois ont le même sentiment. La kora a un immense pouvoir, dans ses cordes il y a quelque chose qui a un effet sur les gens, qui leur transmet une énergie particulière.