Né à Alger, Omizs débarque en banlieue parisienne à l’âge de six ans. D’abord au Blanc-Mesnil, puis au Perreux-sur-Marne, il grandit avec trois sœurs dont il est l’aîné. Son père, malgré un diplôme d’ingénieur en informatique, est contraint de vendre des chips en bas de la tour Eiffel avant de trouver un poste dans son domaine. Tandis que sa mère est assistante maternelle et lui transmet son amour de la musique : « Je suis fanatique de musique depuis tout petit, explique Omizs, surtout dans le délire urbain. Ma mère écoute beaucoup de musique raï : Cheb Hasni, Cheb Khaled etc. Maintenant, avec mes petites soeurs, elle écoute aussi du Soolking. »
Itinéraire d’un plug multi-casquettes
Pratiquant le rugby jusqu’à ses dix-huit ans mais aussi le théâtre pendant une partie de son enfance, c’est à treize ans qu’Omizs se découvre une nouvelle passion dévorante : « Je faisais beaucoup de photos de potes avec un blackberry. Plus tard, j’ai acheté le canon 1600 D et j’ai commencé à aller sur Paris en RER, j’allais pas en cours. Avec mes potes Charly, Rudi et Scott on essayait de s’incruster dans les défilés de mode sans invitation. Des fois on y arrivait, d’autres fois non. Je commençais à faire des photos en dehors des défilés, je parlais de ouf avec les gens, c’était ça mon truc. Au fur et à mesure les célébrités ont aimé ma façon d’être et je suis arrivé à entrer dans les défilés. »
Son style brut et authentique à l’argentique, sa bonhomie et sa confiance dénuée d’arrogance plaisent. Ainsi à 17 ans, Omizs travaille pour Atelier Beaurepaire (marque de vêtement parisienne) et se rend à la fashion week de Tokyo. Peu assidu à l’école mais déterminé à réussir dans l’image et la direction artistique, il passe son bac et commence à travailler avec la marque de vêtements Casablanca, dirigée par Charaf Tarej : « Charaf m’a fait rencontrer trop de gens : à Los Angeles il m’a présenté Asap Ferg, Asap Rocky, Jeremy Lorenzo de Fear Of God. À Paris il m’a fait rencontrer Octavian avec qui on s’entend super bien… Sans Charaf il n’y aurait pas eu Aron non plus. Il a fait partie de ma vie, on a eu nos différends mais ça reste quand même mon mentor. »
Multipliant les rencontres, Omizs décroche d’importants contrats pour couvrir des campagnes avec Adidas, et des marques de luxes comme Rick Owens x Nous Paris et Off-White. En parallèle, pour ses potes, il réalise des clips riches en mouvements et cuts avec une esthétique rétro : Jok’Air, Slimka, Lala &Ce, Octavian… Sur le tournage de « Feel It » d’Octavian, il rencontre d’ailleurs Travis Scott et le filme lors d’une session studio.
Multi-casquettes, Omizs a également participé à la direction artistique d’Octavian ainsi que des albums Tunnel Vision de Slimka ou encore VIe République, le dernier album de Jok’Air, dont il a réalisé la cover. Celle-ci a marqué les esprits pour son hommage à la France multiculturelle et à l’engagement d’Assa Traoré. Si Omizs a toujours eu un côté touche-à-tout, c’est aussi le regretté directeur artistique de Louis Vuitton, Virgil Abloh, qui l’a conforté dans cette idée: « Il m’a pris pour les défilés, il me checkait tout le temps, il me parlait. Ça reste Virgil, mais il fermait jamais la porte. C’est une légende, le premier noir a avoir géré Louis Vuitton, une des plus grandes maisons françaises de luxe. Et en même temps il a fait pull up (monter) des gens qui étaient inconnus. Il était DJ, pote avec tous les rappeurs, D.A. de Louis Vuitton, d’Off White, il faisait de l’architecture, de la photo, de la D.A. pour des albums, comme (celui de) DONDA… Il a fait des covers t’as pas idée, pour Jay Z etc. Mais les gens le savent pas, à part ceux du game. J’ai grave appris de lui : je ne laisse personne me mettre dans une case. J’ai commencé avec la photo et là je sors une tape. Tout en gardant le délire ‘Pictures‘ »
Voyager au loin comme le Peter Pan
Omizs – Peter Pan
Ne pas grandir et voyager dans le temps
Ce monde est rempli de manières, chez nous on parle pas trop
On veut juste naviguer dans putain de navire
Avant de véritablement entrer dans le monde de la mode, Omizs était déjà connecté à celui de la musique. Rappant sans prétention depuis la fin collège et habitué à distribuer des toplines pour ses potes en studio, Omizs s’y met plus sérieusement sous l’impulsion de Slimka (avec qui il a sorti son premier morceau officiel aux côtés de 2cheese) : « Slimka m’a pris entre 4 yeux, et m’a dit : Bro’, tes chaud dans la photo, la D.A., t’es un visionnaire… la musique c’est fait pour toi ! DI-MEH et Aron me l’ont dit aussi. J’étais en studio avec eux, je leur donnais des toplines, au bout d’un moment ils m’ont dit ‘t’es trop fort’. »
Party’s not over
Entre et pendant des voyages aux quatre coins du monde pour ses différents projets (Afrique-du-Sud, Mexique, États-Unis, Angleterre…), Omizs s’est donc lancé dans l’enregistrement d’une première mixtape : Pictures Vol. 1.
« Chaque son (morceau) définit un instant T de ma vie, » raconte Omizs. « Et un instant T, c’est une photo : un sourire, une rencontre… C’est « Facetime » où je suis au tel en soirée, je suis fatigué j’en ai marre, et ça représente un peu l’Algérie avec des sonorités arabes. C’est « Molly », où je suis avec ma meilleure pote (Thee Dian, NDLR) qui a des problèmes, mais on ride (déambule, NDLR) à deux malgré les gens autour. Il y a « Party’s Over » avec Jok’Air qui nous représente nous, les jeunes. On est tous ensemble, on va en date (rendez-vous galant, NDLR) en groupe. Il y a de l’hypocrisie, des gens qui parlent, mais ça fait partie du jeu, comme dans « Euphoria ». Le délire de fête est toujours présent car ça a un peu dicté mes deux dernières années. 100% de mon réseau c’est les soirées. Je vais pas en soirée pour serrer une go, j’y vais pour faire du business. Même si tout s’est fait naturellement. Je me suis retrouvé au bon endroit au bon moment, après j’ai fait mon taff. »
Enregistré sur les deux dernières années, Pictures Vol. 1 propose un rap mélodieux, à la fois aérien et lumineux. Attitude et envie de briller s’entremêlent pour créer une atmosphère onirique : c’est du drip (avoir du style) vaporeux… Avec huit featuring sur les dix titres de sa mixtape, Omizs veut aussi montrer son côté fédérateur : « Je suis de la génération Sexion d’Assaut, MZ, ASAP Mob, Cactus Jack… J’ai toujours eu ce côté groupe. J’aurais pu faire de la musique en groupe, c’est pour ça que je sors une tape avec huits feats. Et ce sont tous des potes : DI-MEH ça fait 7 ans que je le connais, on s’est rencontrés autour du skate à République (Paris, NDLR). Slimka c’est mon frère, il a toujours été là pour moi et j’ai toujours été là pour lui… »
Parmi les featurings, on retrouve également Dame Civile-le duo à la pop cloud et lancinante, la rappeuse pleine de promesses Thee Dian, ou encore l’acteur et chanteur d’envergure internationale Aron. Révélé dans la série Elite, cet artiste germano-espagnol a récemment fait une tournée au Mexique où il a invité Omizs pour l’accompagner en tant que backeur. C’est d’ailleurs là-bas qu’ils ont enregistré « Cadillac » : « On l’a enregistré pendant la tournée, entre deux matelas, en face de la mer, à Zihuatanejo au Mexique. Avec Phenix, ma meilleure amie et manageuse, c’était la première fois qu’on vivait une tournée, c’était intense. C’était kiffant, mais tu dois tout le temps rester concentré, ça demande beaucoup d’énergie. Par exemple, on a eu une date à Tijuana, la capitale mondiale des narcotrafiquants. Une demi-heure avant le show, on apprend que c’est annulé alors qu’on est prêt. Finalement on nous dit que ça reprend, mais dans une autre salle… Pour qu’à la fin ce soit vraiment annulé à cause des narcos. Ils voulaient qu’on allonge de la thune pour faire le concert, c’est eux qui dirigent. »
Bientôt, c’est sous son propre nom qu’Omizs montera sur scène. En attendant, il organise déjà les “Omizs Party”. Des soirées déchaînées qui font du bruit dans le petit milieu parisien (il y en a même eu une à Madrid). Condensé de showcases et DJ Sets survitaminés assurés par ses amis, chaque édition créé l’événement : « La première Omizs Party, au MGeorges (un club parisien, NDLR), c’était l’anarchie ! Il y avait 1600 personnes. Et au moins 200 qui voulaient rentrer. Virgil est venu, il y avait Jok’Air, Bilal Hassani, Sneazzy… des gens que je connaissais même pas. Carrément le patron du George m’a dit : Travis Scott a pas rempli autant que toi . Il y était une semaine avant… »
Assurément le plug préféré de ton plug préféré, on se demande comment Omizs trouve le temps de dormir. « J’ai la chance d’avoir une bonne organisation et une bonne team derrière moi », assure Omizs. « Que ce soit les RP, le label E47, Phenix ou mon meilleur pote Rudi. »
Avec Pictures Vol. 1, il offre une porte d’entrée dans son univers ultra coloré et rempli d’attitude. Célébrant un mode de vie festif fait de voyages, d’argent et de rencontres, il souhaite surtout montrer que tout cela est accessible à tous (à condition d’être curieux et habité d’une détermination sans faille) : « C’est sûr que je vais plus toucher les parisiens que les jeunes de Brest, mais je vais peut être donner envie au jeune de Brest, ou d’ailleurs, de connaître ce milieu, rider et avoir un lifestyle. Je veux que les jeunes suivent notre chemin dans le sens où il faut pas qu’ils aient peur. »
Retrouvez Omizs dans notre playlist Pan African Rap sur Spotify et Deezer.
Pictures Vol. 1, disponible dès maintenant.