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Dans les disques de Franck Descollonges : Marcos Valle

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Cet été encore, le patron du label Heavenly Sweetness nous écrit pour partager les trésors de sa discothèque. À lire et écouter sans modération. Aujourd’hui, le Brésilien Marcos Valle.

Bonjour à toutes et à tous,

Heureux de passer un nouvel été en votre compagnie, à explorer et partager les petits vinyles de ma collection. En espérant qu’ils trouveront également une place dans la votre !

L’année dernière, nous avions commencé en fanfare (brésilienne) avec Jorge Ben, cette année on ouvre la saison avec un autre géant de la musique auriverde : Marcos Valle. Et là encore, la discographie est tellement large, les tubes tellement nombreux qu’il va être difficile de faire le choix…

J’ai découvert la musique de Marcos sur la compilation Brasilica de Gilles Peterson et Joe Davis (Far Out Recordings) qui a été pour moi une véritable initiation à la musique brésilienne des 60’s (Sergio Mendes, Jorge Ben, Elis Regina, Tamba trio…). Le titre de Marcos Valle « Crickets Sing for Anamaria » a directement imprimé mes tympans avec ce riff de guitare sur un tapis de percussions, la mélodie imparable (malgré un accent anglais qui n’est pas celui d’Oxford) et ce break de batucada en plein milieu. En 2 minutes, on retrouve la quintessence de la musique brésilienne des 60’s. 

En effet, Marcos Valle fait partie (avec son frère) de la nouvelle vague des musiciens bossa nova dès son premier album en 1963. Il enchaînera plusieurs albums chantés en brésilien mais aussi en anglais et ses morceaux seront repris par d’innombrables artistes. On peut noter son album instrumental Braziliance de 1966 qui montre toute l’étendue de son talent de compositeur et arrangeur. Il écrira d’ailleurs de nombreuses musiques de films et autres Telenovelas au Brésil mais aussi aux USA.

Mais ce qui m’impressionne le plus chez Marcos Valle c’est  le sens de la mélodie, son chant et ses refrains. Démonstrations en 3 albums :

Garra (1971)

Dès 1969, Marcos quitte les territoires bossa nova pour aller vers des expérimentations plus pop-rock, psychédéliques ou progressives. Cet album en est un bon exemple avec des cordes, des choeurs, un orchestre, des claviers et des effets psychés…. Programme chargé !

Avec des titres comme « Garra » ou « Que bandeira » on se rapproche de la perfection pop, comme chez les Beatles mais avec les rythmiques et le groove  brésiliens en plus. On ne s’en lasse pas. À écouter tous les matins de cet été pour faire le plein de good vibes et de soleil ! Un titre comme “Paz e Futebol” vous donne même le programme idéal.

Vontadé de Rever Vocé (1981)

Jusqu’en 1974, Marcos enfile les excellents albums comme des perles (les vinyles originaux valent un bras d’ailleurs, voire un rein), il expérimente le jazz-funk avec les futurs membres de Azymuth, le rock progressif voire le hard rock. 

Puis arrive un long break jusqu’à cet album de 1981. En effet, en 1974 il quitte le Brésil pour les Etats Unis, déçu par le gouvernement militaire de l’époque et la censure. Il retrouve d’abord son ami Déodato à New York puis décide de s’installer à Los Angeles, un endroit plus proche de Rio niveau climat.

Petit à petit il y fait son trou dans la scène musicale et collabore notamment avec Sarah Vaughan, Chicago, Airto Moreira et enfin Leon Ware, avec qui la fusion artistique sera intense. 

En 1981, retour au Brésil, et ce tour de force de Marcos : creuser un tunnel  qui relie directement le deux fois trois voies de Copacabana à Santa Monica en Californie. Cet album est la conséquence directe de son séjour à LA, de l’ambiance de la ville et de sa prolifique collaboration avec Leon Ware. La rencontre très “sweet” de la soul west coast avec la musique brésilienne… du R&B avec la Samba. Marcos a d’abord enregistré deux titres à L.A avec les musiciens de Chicago et les backing vocals de Ware avant de rentrer à Rio, éditer les titres et y rajouter des percussions brésiliennes. 

Le reste de l’album a été enregistré au Brésil avec des pointures comme Sivuca, Airto Moreira, José Roberto Bertrami d’Azymuth…, mais on jurerait qu’il s’agit d’un album de funk west coast enregistré à Los Angeles. Tout est là : la production super léchée, les effets, les grooves…  tout ça à la sauce brésilienne avec la perfection vocale de Valle. L’album idéal à écouter en voiture… décapotable évidemment.

Adepte du minimalisme, passez votre chemin, ici il y a des instruments dans tous les coins, et même un accordéon, ce qui est plutôt rare sur du funk 80’s. Il faut savoir que l’accordéon est un instrument phare du Nordeste, musique que Marcos adore depuis son plus jeune âge.

Marcos Valle (1983)

La suite de Vontadé … toujours des titres écrits avec Leon Ware mais avec un son encore plus gros, plus boogie, qui contient le titre intersidéral “Estrelar”. Un tube qu’on devrait entendre dans tous les clubs de la planète si cette dernière tournait rond… Là aussi, cet été si vous voulez lancer votre soirée et commencer à vous déhancher, voilà le titre idéal. Testé et approuvé.

Le son de cet album est tellement maouss…et c’est notamment dû au travail d’arrangement et aux synthés du génie brésilien Lincoln Olivetti, le génie du disco boogie. Quand vous croisez son nom sur un album brésilien, vous pouvez y aller, il sera bon et groovy !  

Les vinyles sont aussi une histoire d’amitié… Ce disque m’a été offert par Guts lors d’un de ses voyages au Brésil il y a quelques années. Il savait que j’adorais « Estrelar » et a pensé à moi quand il l’a croisé dans les bacs. Cet album n’en a donc que plus de valeur…. Merci Gutsy !

Enfin pour la petite histoire, « Estrelar » a été l’un des derniers titres écrit avec Leon Ware aux USA. Comme le titre n’avait pas de paroles, il n’avait pas été utilisé précédemment. Olivetti est tombé amoureux du morceau, qu’il a re-produit mais quand la fin de l’enregistrement de l’album est arrivé, le titre n’avait toujours pas de texte. Le deal était alors simple : soit Marcos écrivait au plus vite des paroles, soit le titre était éjecté de l’album…. Marcos est donc allé en urgence dans un studio, a joué l’instrumental à fond et a voulu retranscrire l’énergie du morceau avec des mots, et ça a donné « Estrelar », qui se traduirait par « être en forme », prendre soin de soi et de son corps pour l’arrivée de l’été. Des préoccupations qui n’étaient pas aussi répandues en 1983 que maintenant, où les salles de crossfit et autres sont pleines.

Cette anecdote explique le concept de la pochette. Pendant des années j’ai cru, que Marcos, tout bronzé, posait au milieu de cocktails alcoolisés puis je me suis aperçu que c’était… des jus de fruits ! Tous plus colorés les uns que les autres.

Voilà un bon programme pour attendre la semaine prochaine et le deuxième épisode de nos aventures musicales. D’ici là, je vous ai concocté une petite playlist de toute beauté pour patienter en musique.

PS : À l’heure ou j’écris ces lignes, je viens de recevoir une newsletter annonçant une collaboration entre Marcos Valle et Adrian Younge & Ali Shaheed Muhammad (de Tribe called Quest) pour leur nouveau label Jazz is Dead. Une aventure à suivre de près !

Abonnez-vous à la playlist de la série sur Spotify et Deezer.

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