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The Pan African Music Magazine
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Arka’n : "Le metal fait parler une rage qui est présente en Afrique"

En Afrique, le métal a essaimé et fait émerger de nouveaux groupes qui en proposent une version originale, pétrie de leurs héritages. En Afrique de l’ouest, le groupe togolais Arka’n en est l’une des expressions les plus réussies. PAM les a rencontrés lors des rencontres Acces au Ghana. 

« Le métal vient du rock. Le rock vient du blues. Le blues vient des Noirs déportés en Amérique. La base même du métal vient de chez nous. Metal is African ! ». Ce sont ces mots qui ont servi d’explication au show mémorable qu’a livré Arka’n à la conférence ACCES 2019 face à un public secoué et ravi. À Accra, le groupe n’était qu’à 3 heures de route de leur pied-à-terre, Lomé, dont sont originaires ses cinq membres. Le Togo et sa culture ont une place importante dans leur musique. La particularité du groupe tient effectivement à la fusion inédite entre musicalité et folklore togolais et métal pur et dur ; métal-fusion, afro-métal, new métal, leur genre échappe aux classifications. Leur album Za Keli, sorti en février 2019, a suscité un engouement croissant en Afrique de l’Ouest et plus largement sur le Continent, et par la force d’internet, dans différentes zones du monde. Alors que Mass Aholou (percussions) et Francis Amevo (basse) étaient déjà rentrés au Togo, PAM a rencontré Rock Ahavi (chant et guitare), Richard Cico (batterie), Enrico Ahavi (voix) escortés de leur manageuse,  Béatrice Manigat. 


Pouvez-vous nous raconter les débuts d’Arka’n ?

Rock : Arka’n a été créé en 2009, d’abord par moi seul à la guitare, au clavier et à la voix. Puis j’ai eu la possibilité de former un vrai groupe en 2013 avec d’autres musiciens prêts à m’accompagner dans ce projet. Nous sommes restés ensemble jusqu’en 2016. C’est après cela que la formation actuelle a été créée. 
 


Comment votre vécu au Togo a influencé la direction musicale que vous avez choisie ?

Enrico : Je ne dirais pas que c’est le Togo qui nous a aidé (rires). Par contre, il a ramené le côté traditionnel qui est présent dans notre musique, cette fusion entre le métal et notre culture. C’est surtout notre père qui nous ramenait des CD de rock.

Rock : Au Togo, à un moment, il y a eu une culture de rock, blues et jazz assez développée entre les musiciens togolais et étrangers. À l’époque on vivait à Kpalimé, une ville au nord de Lomé où on vendait des cassettes de ACDC ou Scorpions au marché ! C’était facile. C’est par là qu’on a commencé par le rock puis avec internet on a découvert d’autres formes de rock, comme le métal. On écoutait Metallica, Slipknot… Pour nous, la fusion avec les rythmes togolais n’est pas recherchée, elle est naturelle. C’est comme si on parlait le métal dans notre langue. Après, je constate que quand on écoute les patterns de batterie de métal, elles se confondent avec les patterns qu’on joue dans nos villages. 

Richard : Moi j’étais dans le Ndombolo. Puis je suis tombé sur Jimi Hope : c’est lui qui fait de la musique rock au Togo. J’y ai pris goût et avec Rock j’ai découvert le métal. Je suis dans le métal à fond maintenant. 

Béatrice : La question des influences du groupe revient souvent, et c’est toujours compliqué d’y répondre. Souvent on essaie de placer le groupe en disant « Arka’n c’est du new métal, c’est un peu de ci, un peu de ça, ils sont influencés par ça… ». Mais les gens ont du mal à comprendre qu’un groupe puisse arriver avec quelque chose de complètement novateur. Je crois que c’est ça qui fait la particularité du groupe : c’est nouveau, c’est inédit. Les critiques de métal africain et les magazines spécialisés ont été obligées de reconnaître que l’on n’avait jamais entendu ça. Les gens commencent à le comprendre, notamment après les concerts qu’Arka’n donne. C’est un groupe qui fait date, et ça peut inspirer d’autres artistes à se dire qu’eux aussi peuvent créer quelque chose de nouveau.


En live, vous faites mention d’un portail métaphysique que votre musique serait censée ouvrir. Quel lien faites-vous entre spiritualité et métal ? 

Enrico : Le fameux côté obscur de la force (rires) ! Souvent, on perçoit le métal occidental comme visuellement très marqué, avec une imagerie sombre, qui peut pour certains évoquer des forces occultes, voire satanistes, même si ce n’est pas toujours le cas. Mais dans Arka’n, spiritualité et métal vont ensemble. Nos messages sont spirituels : on va dans la profondeur des choses, des forces qui nous entourent, des esprits africains… Même dans les compositions et les paroles, ça se remarque. Il y a un rapport avec la spiritualité parce que c’est ce que nous sommes. On ne peut pas échapper à nous-mêmes et nous sommes nés spirituels. 

Rock : Souvent, le spirituel, c’est ce qu’on ne voit pas. Pourtant, pour Arka’n et l’Afrique en général, les forces spirituelles et les choses physiques ne sont pas deux domaines séparés. Au contraire, l’un est le prolongement de l’autre, la continuité. Les corps, les pierres, les arbres ont une âme. Quand on essaye de voir les énergies, c’est autre chose. Donc on ne sépare pas le spirituel de notre musique, tout est aligné. Le mot « Arcane » fait justement référence aux côtés cachés de l’univers. 


Comment êtes-vous perçus par les différents publics africains ? 

Richard : Je pense que quand vous allez sur internet, sur nos vidéos, les gens aiment ça. Les chiffres augmentent de manière exponentielle, et notre sélection pour la conférence ACCES en témoigne. 

Rock : Notre musique n’est pas une version européenne du métal qu’on a greffé en Afrique. On parle Ewé, notre langue locale, donc les gens comprennent le sens spirituel de ce qu’on chante. Les rythmes qu’on joue ne sont pas purement européens, et les gens s’y reconnaissent. Parfois on joue Arka’n à un gars du village et il nous répond que c’est de la bonne musique de chez lui, il se retrouve dans ce qu’on fait, tout comme les Occidentaux fans de métal. Comme ce qu’on fait est différent et ne se cloisonne pas dans une tendance pop, notre public n’est pas non plus divisé en tranche d’âge. Tout le monde écoute. 


En tant qu’insider, comment trouvez-vous que se porte et qu’évolue la scène de métal africain ?


Rock : La scène évolue énormément en Afrique, surtout en Afrique de l’Est et australe : en Ouganda, en Afrique du Sud, au Botswana, au Kenya… En Afrique du Nord aussi : au Maroc ou en Tunisie par exemple. Le métal prend vraiment son essor parce que le métal, c’est des artistes qui revendiquent. Le métal a presque la même conscience que le reggae. C’est un genre assez agressif, qui fait parler une rage qui est présente en Afrique. 

Arka’n, Acces 2020 par Sonia Achdjian

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