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Stonebwoy, diamant du dancehall made in Ghana
Photo à la une : Twins Dont Beg

Stonebwoy, diamant du dancehall made in Ghana

Après ses collaborations avec Sean Paul, Sarkodie ou Burna Boy, le chanteur ghanéen poursuit son ascension avec la sortie d’Anloga Junction, un album au casting XXL qui surfe sur les courants de l’Atlantique noir, sans oublier son village d’origine. Portrait.

Stonebwoy sera en concert le 23 avril à l’Elysée Montmartre dans le cadre de la soirée « Accra in Paris ». Tentez de gagner vos places en envoyant votre nom et prénom à [email protected], avec « Accra in Paris » en objet.

Depuis 2019, le Ghana a dépassé l’Afrique du Sud pour devenir le premier producteur d’or du continent africain tandis que, concurrençant ceux du Nigéria, les musiciens ghanéens n’en finissent plus de s’imposer à l’international. Parmi cette mine de talents qui ont su faire du Ghana un laboratoire musical dynamique, un nom caracole en tête des charts depuis des mois : Livingstone Etse Satekla, alias Stonebwoy.

Anloga

Après #Grade1 (2012) et Necessary Evil (2014), plutôt bruts de décoffrage, puis Epistles of Mama (2017), un double-album plus personnel en hommage à sa mère, le chanteur semble avoir trouvé le calibre idéal pour son “afro-dancehall ou dancehall africain”, un alliage d’afrobeats et de dancehall poli par des touches reggae, soca, rnb ou hiplife. S’il revendique sans fard la paternité et le succès du genre – au risque d’énerver ses rivaux, Shatta Wale en tête – Stonebwoy reconnaît qu’il a gagné en nuances et en maturité : son nouvel opus Anloga Junction en est la preuve par quinze et ce, dès le titre d’ouverture “Le Gba Gbe”. “Je suis comme un diamant affiné à présent. J’ai trouvé l’équilibre entre mes influences, mon identité et mes ambitions. Ces dernières années, ma musique et moi avons grandi spirituellement, c’est pourquoi je suis prêt à célébrer mon ethnicité. Je suis un fils de l’Afrique et dans ce monde où tout est fait pour se perdre, c’est très important de savoir où sont ses racines, de les honorer et de faire rayonner la diversité de nos cultures.” En atteste le titre du disque, celles de Stonebwoy se trouvent à Anloga, ville de sable et de pêcheurs posée sur la lagune de Keta, à 160 kilomètres d’Accra. “C’est là où mes parents sont nés, là où vivent nos aînés et l’esprit de nos ancêtres. J’y suis toujours allé avec bonheur : la région est sauvage, magnifique. Elle m’inspire beaucoup” explique-t-il alors qu’il met sa famille à l’honneur dans le clip d’ “African Party”. Et si jusqu’à présent, Stonebwoy a chanté la majorité de ses tubes en anglais, le voilà qui revient plus franchement à l’éwé, la langue du peuple Anlo, comme à un talisman. Plus surprenant, le disque révèle aussi quelques titres… en patois rasta !

Trait d’union 

Stonebwoy, fils d’une famille de classe moyenne, grandit à Ashaiman, dans la banlieue d’Accra. “Une chance”, dit-il, “car j’étais aussi bien parmi les enfants du ghetto que ceux des familles plus aiséesdonc j’étais au contact de plusieurs cultures et de toutes sortes de musiques.” Avant de se tourner durablement vers le dancehall, par essence plus festif, plus léger et peut-être plus moderne, c’est d’abord du reggae dont il tombe amoureux. Celui des pères fondateurs jamaïcains (Bob Marley, Burning Spear ou Peter Tosh), celui de leur descendance (Damian Marley, Jah Cure ou Sizzla), et celui des Africains tels que Lucky Dube ou encore Rocky Dawuni, qui fédère légion de rastafariens ghanéens depuis les années 90. Car ce n’est pas en Éthiopie – terre du messie Haïlé Sélassié – que vit la plus grande communauté rasta du continent mais bien au Ghana, très tolérant à l’égard des adeptes de Jah, contrairement à de nombreux pays africains où dreadlocks, végétarisme et ganja ne font pas bon ménage avec la culture locale. D’ailleurs au Ghana, même le président Nana Akufo-Addo encourage le retour à la Terre-Mère : il s’embarquait l’an dernier dans une tournée caribéenne, Jamaïque comprise, pour promouvoir ce qu’il a nommé “l’Année du Retour”, répondant au désir croissant des descendants d’esclaves de revenir aux origines de leurs ancêtres. Une vieille histoire au Ghana.

Stonebwoy, lui, fera le chemin inverse. Lorsqu’il atterrit à Kingston pour la première fois en 2016, le chanteur se sent immédiatement chez lui et ce voyage confirme son intuition : “le reggae, c’est la connexion musicale qui témoigne du périple tragique des esclaves noirs de l’Afrique à l’Amérique : il porte en lui cette connexion des peuples. Le continent africain, c’est la Jamaïque en plus grand c’est tout, nous sommes tous frères et sœurs.” Ce trait d’union transocéanique, Stonebwoy le défend depuis le début de sa carrière et l’évoque encore sur Anloga Junction, notamment dans la chanson Journey”.

(c) Hedil Osei Wharton Walker (Korkorte)

Babylone

Dans les faits pourtant, il semble que Stonebwoy préfère le son à l’idéologie et l’entreprenariat au mode de vie rasta. Il faut dire que le Ghana invite aux affaires : stabilité politique, économie dynamique et diversifiée, douceur de vivre… À 32 ans, Stonebwoy a depuis longtemps rejoint les rangs des artistes-entrepreneurs.

Ma détermination est innée” juge celui qui, dès le lycée, met tout en œuvre pour percer. Après quelques singles faits maison et des freestyles radio qui valent au chanteur une bonne notoriété dans l’underground d’Accra, la carrière de Stonebwoy décolle véritablement lorsque Samini, parrain du dancehall ghanéen, le prend sous son aile en 2010. Deux ans plus tard, il sort son premier album et lance son propre label, Burniton Music Group. Puis les choses s’enchaînent très vite : quelques années plus tard, Stonebwoy assure les premières parties de Lauryn Hill et Wizkid, gagne de nombreux prix dont un BET Awards en 2015, enchaînant depuis les collaborations prestigieuses avec Sean Paul, Sarkodie ou Burna Boy. 

En bon chef d’entreprise, Stonebwoy a développé sa marque de vêtements, BHIM — pour Bless His Imperial Majesty, et investit à présent dans des artistes à suivre de près tels que Kwesi Arthur, Darkovibes, Medikal ou Kelvyn Boy. Plus étrangement, il verse aussi dans les boissons énergétiques : ainsi peut-on voir Stonebwoy poser pour Big Boss, dont il est l’égérie et le propriétaire de la franchise ghanéenne. Quid de Babylone alors ? “Un leader a des responsabilités et doit savoir faire des sacrifices”, répond-il, énigmatique…

(c) Twins Dont Beg

African Idol

Anloga Junction témoigne clairement des ambitions internationales de Stonebwoy, qui invite les voix de Kojo Antwi, légende du pop-reggae ghanéen, Nasty C, rappeur sud-africain, Keri Hilson, diva rn’b américaine, Diamond Platnumz, star du bongo flava tanzanien, Alicai Harley, chanteuse jamaïcaine basée à Londres, ou encore le phénomène nigérian Zlatan. Ghanéen, panafricain, diasporique et mondial… un casting XXL qui n’oublie personne. Idem du côté des producteurs où l’on retrouve des poids lourds dont Nana Rogues (Drake), Andre Harris (Usher, Chris Brown, Kanye West), Kabaka Pyramid ou encore Phantom (Burna Boy) qui utilise d’ailleurs, comme les géants Timbaland et Major Lazer, le fameux sample de Toto la Momposina sur l’excellent “Critical”. 

Un rêve américain ? “Je vois grand c’est vrai, j’assume mes ambitions”, reconnaît Stonebwoy. “Mais mon rêve est avant tout panafricain, je n’ai jamais eu l’intention de quitter le Ghana pour aller vivre ailleurs. Les rêves d’Amérique ou d’Europe sont très dangereux pour les Africains. Cultivons l’Afrique autant que possible, soyons fiers et unis !” Une fierté africaine que le chanteur encourage notamment sur “African Idol”, porté par la rondeur des percussions éwé. Qui sont ses idoles africaines ? Sans hésiter, Stonebwoy mitraille : “Kwame Nkrumah, JJ Rawlings, mais aussi Marcus Garvey, Malcolm X et Elizabeth Nyamayaro, une politologue féministe zimbabwéenne qui travaille pour l’ONU. Des reines et des rois qui combattent les forces des ténèbres et nous poussent à regarder dans la bonne direction. Pourtant la politique, ce n’est pas mon truc”, dit-il en anticipant la question suivante. “Elle déçoit trop souvent, je ne veux pas nourrir ce concept qui divise les gens pour (nourrir) ses propres intérêts. Il y a d’autres façons d’œuvrer au bien de la communauté.” Comme d’autres artistes au Ghana, Stonebwoy a créé une fondation : The Livingstone Foundation soutient en effet des élèves défavorisés dans l’accès à l’éducation et se montre très active auprès des plus démunis en ces temps d’épidémie. La solidarité, c’est politique non ? 

Anloga Junctiondisponible depuis le 24 avril. 

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