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The Pan African Music Magazine
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Pinto, c’est la pâte

Un feuilleton inédit pour PAM, signé Blick Bassy et illustré par Raphaëlle Macaron. 

Après la soirée de promotion catastrophique de son nouveau single, Pinto doit faire face à son premier bad buzz. Mais un bad buzz… reste un buzz. À lui d’en profiter !

Bad buzz (épisode 6)

Le portable de Pinto sonne.

Pinto : Allo… allo, c’est qui ? 

Mbarga : Mouf ! Dégage ! Tu demandes c’est qui hein ? Tu sais combien coûte la vitre de mon armoire, petit ? Tu sais combien ça coûte ? Tu as vu dans quel état vous avez laissé la maison que je vous ai gentiment louée ? Tu oses demander c’est qui ? Toi qui suppliais il y a deux jours ? Je pense que tu es fou dans ta tête !

Pinto : Oh ! My grand, excuse-moi, j’ai pas reconnu ta voix.

Mbarga : Ah bon, hein ? Ne la reconnais même plus jamais. En tout cas, je te donne deux jours pour venir nettoyer ma maison et me la remettre dans le même état que lorsque je te l’ai remise, avec mon armoire dans un état nickel. Deux jours, pas plus !

Pinto : Merde, il m’a raccroché au nez. Putain c’est chaud, il faut que je call Bella.

Le portable de Bella sonne.

Bella : Yes c’est comment ? Tu as pu dormir ? Moi je n’ai pas fermé l’œil depuis hier. Je « science » pour trouver la solution aux problèmes qui nous wait. Ma tête chauffe !

Pinto : C’est Mbarga qui m’a réveillé gars, il dit qu’il faut qu’on lui remette sa maison comme il nous l’a donnée. On va faire comment ? L’argent de la promo a été volé, et même les journalistes n’ont pas été payés. 

Bella : Yeuuuh, tu avais tout l’argent de la promo dans la sacoche ? Je pensais que ce n’étaient que les enveloppes des journalistes ?

Pinto : Gars, toi aussi ne m’énerve pas, hein ? N’est-ce pas je t’ai dit hier que j’avais tous les do dans la sacoche ? Tu veux que je te le dise en ewondo pour que tu comprennes ?

Bella : Je n’avais pas « ya » ça, j’avais mal compris alors. Bref, pas la peine de s’énerver, on est déjà assez dans la merde comme ça. Il faut qu’on trouve des solutions. C’est chaud gars !

Pinto : La priorité c’est l’armoire de Mbarga, je vais call mes petits du quartier pour qu’ils aillent nettoyer sa maison. On va trouver les do où ? Sans parler de la promo, on va faire comment ? On ne peut pas ndem, tout foirer comme ça. Ça c’est quelle malchance ça, non ? Le way ci n’est pas simple je te jure.

Bella : Parlant de promo, Ochekue m’a déjà laissé plus de dix messages pour me dire que les journalistes sont rentrés très fâchés hier après la fouille que la police leur a infligé. Elle dit que pour qu’ils fassent la promo du single ça va couter deux fois plus cher, et même que certains journalistes sont contents de ce qui est arrivé, car c’est une occasion pour eux de te taxer doublement. Bref, on est vraiment dans de sales draps. L’usine de fabrication des CD m’ a aussi envoyé un mail pour réclamer le solde qu’on leur doit. J’ai aussi reçu un message de Maboma qui est censé réaliser le clip du single. Il exige une avance avant qu’on ne commence le tournage. Je crois qu’il n’est pas content de ne pas avoir été invité à la fête, du coup il ne veut plus être payé en plusieurs fois.

Pinto : J’en ai marre de tous ! Qu’ils me lâchent, dis-lui qu’on s’en fout de son petit talent, il n’est qu’un petit réalisateur de clip. Il ose me parler comme ça ? N’importe qui vient me parler n’importe comment maintenant ? Ils savent qui je suis ? Je ne suis pas les « moins chers » avec qui ils ont souvent eu à faire, tu comprends ? Dis-leur ça ! C’est quoi même !

Bella : Mbom, calme-toi s’il te plait, il faut qu’on règle tous ces problèmes. 

Pinto : Gars il ne faut pas oublier que je suis Pinto hein, je n’ai pas de problème. Que tous ces gens-là se calment. 

Bella : On a plus beaucoup de temps avant la sortie du single, en plus Zomloa le producteur rentre ce soir, je ne sais même pas ce que je vais lui raconter.

Pinto : Ça, c’est ton problème, démerde-toi avec lui ! C’est toi le manager.

Bella : Je viens de recevoir un texto de Malondo. Il dit que la rumeur court que ce sont les « microbes » qui nous ont frappés. Il paraît que deux d’entre eux se sont introduits pendant que nous faisions la fête, ils auraient volé ta sacoche, quelques sacs à main, des smartphones et des bouteilles de champagne.

Pinto : Hummm… effectivement je crois avoir aperçu un jeune qui mangeait goulûment dans un des plateaux remplis de poulet braisé, mais je me suis dit que l’alcool me faisait voir des fantômes. Putain, j’aurais dû attraper ce petit salaud ! 

L’autre portable de Bella sonne.

Bella : Tiens c’est Ochekue qui m’appelle, je lui réponds et te rappelle OK ? A toute.

– Allô, Oche c’est comment ?

Ochekue : C’est comment hein ? Vous avez lu les journaux ce matin ? 

Bella : Non pourquoi, et depuis quand on lit les journaux, il y a quoi dedans ?

Ochekue : Ton artiste fait la une de tous les journaux avec une version des faits différente.

Bella : Hein ! ils racontent quoi ?

Ochekue : Ils disent que vous avez organisé cette fête pour dépouiller les journalistes et autres invités afin de financer la com du single de Pinto !

Bella : Paaaaaapa ! Les gars sont inspirés. Escroquer les journalistes ? Ils ont quel argent les journalistes ? Ils sont même plus fauchés que les artistes. Je wanda ! (j’hallucine) Le pays-ci va me tuer ! 

Ochekue : En tout cas c’est pas bon du tout, j’ai déjà du mal à convaincre les journalistes au vu de ce qui s’est passé hier. S’il faut en plus que l’opinion publique ait une salle image de Pinto, tout ça risque vraiment de compliquer les choses. 

Bella : Je sais Oche, je sais qu’on ne te facilite pas la tâche, mais on doit se battre ensemble, on peut pas ndem, le public attend ce single et c’est un tournant important pour Pinto, on ne peut pas le rater.

Ochekue : Je comprends parfaitement et tu sais bien que j’ai toujours été là, mais je te préviens : cette fois-ci je ne pourrai pas bosser sans argent, j’ai aussi des factures à payer. Faites signe quand vous êtes prêts, on s’appelle plus tard. 

Bella : OK on fait comme ça, on est ensemble !

Le portable de Pinto sonne.

Bella : Yo gars c’est how ? Tu es chez toi ? 

Pinto : Yes tu veux que je go où, avec tout ce qui se passe ?

Bella : OK j’arrive.

*

Bella : Donc voilà ce qui se passe, en plus de tous les problèmes qu’on doit gérer, certains médias s’en mêlent. 

Pinto : Quand il s’agit de faire la promo des artistes camerounais qui souvent n’ont même pas de quoi manger, ils demandent de leur payer des bakchichs, et on leur donne. Par contre, lorsqu’il faut dire du mal, là ils sont champions et ils le font gratuitement.

Bella : En tout cas je suis venu pour qu’on fasse le point et qu’on trouve des solutions pour régler tous ces problèmes. Il faudrait aussi qu’on s’accorde sur ce que nous allons dire à Zomloa qui arrive ce soir.

Pinto : Il faut vraiment qu’on trouve des solutions, Mbarga voudrait garder ma voiture comme gage, le temps que son armoire soit remise en état. Cette soirée était vraiment une mauvaise idée… Elle nous a ramené à elle seule plus de problèmes que nous n’avons eu jusqu’ici. D’ailleurs c’était ton idée non ?

Bella : Non arrête, tu m’as informé après avoir déjà tout décidé. 

Pinto : Mais pourquoi tu ne m’as pas découragé ? C’est vraiment ta faute, tu es manager et tu es incapable d’anticiper. Tu devrais même avoir un marabout avec lequel travailler pour nous éviter ce genre de problèmes. C’est le travail du manager, monsieur.

Bella : Écoute Pinto, je ne veux pas me prendre la tête avec toi OK ? Je fais de mon mieux et je sais que tu le sais bien. Il faut arrêter de rejeter la faute sur moi à chaque fois qu’il y a un problème. On devrait réfléchir ensemble au lieu de rejeter la faute l’un sur l’autre.

Pinto : On fait quoi alors maintenant ? Le single doit sortir et nous n’avons pas de clip, pas d’argent pour la communication et l’autre fabricant de CD nous demande de payer, sachant que le CD sera de toute manière piraté avant la sortie du single, peut-être même par lui-même. Bref tout ça me fatigue.

Bella : Hé, on ne va pas se laisser abattre. Tous ces journaux nous ont peut-être fait la promo gratuitement sans le savoir : la mauvaise promo reste de la promo, un bad buzz reste un buzz. À nous d’en profiter ! Nous devons capitaliser sur tout ça en sortant le single dans la foulée. 

Pinto : Tu ne connais pas quelqu’un qui pourrait nous prêter de l’argent ?

Bella : On doit déjà de l’argent à tous mes voisins, on doit de l’argent à mon oncle et à ta grande sœur. La seule solution serait de réfléchir à une autre opération auprès de Zomloa avec la copine de ta go.

Pinto : On parle du loup, on voit sa queue, c’est lui qui m’appelle.

Bella : Qui ? Zomloa ?

Pinto : Oui… mince je lui dis quoi ? Je décroche ? On fait quoi ? 

Bella : Ne réponds pas, ne réponds pas, il faut d’abord qu’on s’accorde sur ce qu’on va lui dire.

Pinto : Ouf, l’appel s’est arrêté, mon cœur bat fort ! 

Bella : Mince il m’appelle aussi, il n’appelle jamais, il est peut être au courant de ce qui s’est passé… On est foutus. 

Pinto : Attends il m’a laissé un message, écoutons-le d’abord.

Il dit qu’il a une super bonne nouvelle pour nous, il demande à ce qu’on le rappelle. Rappelle-le !

Bella : Non, toi, rappelle-le ! C’est à toi qu’il a laissé le message !

Pinto : Non, c’est toi le manager !

Bella : OK OK, je l’appelle.

Le portable de Zomloa le producteur sonne.

Bella : Allo le boss, tu es rentré ? 

Zomloa : Hey mes petits, comment allez- vous ? Je viens de vous laisser des messages. J’ai une super nouvelle pour vous.

Pinto : Gars, mets-le sur haut-parleur !

Zomloa : Je viens de rentrer de Dubaï, et pendant mon séjour j’ai rencontré à l’hôtel où je siégeais le patron d’une major et un éditeur, tous les deux français. D’ailleurs je ne sais pas trop ce que c’est qu’un éditeur, bref je leur ai dit que je suis producteur et j’ai fait écouter ton ancien single. Ils sont super intéressés par Pinto, ils m’ont laissé leur carte de visite afin qu’on se parle très très vite. C’est du lourd les gars, du très très lourd !

Pinto : Oooh mon boss je suis avec Bella, je savais que tu étais notre champion, merci boss, tu es le meilleur, tu es le seul et l’unique Zomloa-le-producteur.

Bella : Merciiiii boss, tu ne peux pas savoir combien cette bonne nouvelle nous met bien, tu es notre sauveur my big.

Zomloa : Attendez d’abord, il faut que je discute avec eux, mais ils m’ont envoyé deux mails le lendemain de notre rencontre. C’est plutôt un très bon signe. Je dois les rappeler dans deux jours.

Pinto : Hey boss tu bois quoi ? J’ai une tri-tri bien glacée pour toi, retrouvons nous au bar de Molo l’infalsifiable hahaha. En tout cas, tu es notre champion. Dieu est grand, je savais qu’il ne pouvait pas me laisser tomber, Dieu est fort.

Bella : Merci Boss, merci.

Zomloa : OK je dois vous laisser, je vous tiens au courant, je suis encore à l’aéroport. On se parle plus tard.

Pinto : OK boss, bonne arrivée.

Bella : OK boss, merci encore.

À peine Bella a-t-il raccroché, que Pinto lui saute dans les bras…

Pinto : Je savais, putain je savais qu’on s’en sortirait. Merci seigneur…. gars, tcha le verre ci, on doit fêter ça, je vais prendre un bon whisky dans l’armoire. Les choses ne font que commencer et je propose à tous ceux qui ne sont pas contents de sauter et de caler en l’air !

Ils trinquent.

FIN

Pinto, c’est la pâte, un feuilleton inédit pour PAM, signé Blick Bassy et illustré par Raphaëlle Macaron.