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Lucibela : la nouvelle voix de la morna

Lucibela

La chanteuse capverdienne, à peine plus de trente ans, donne son premier concert parisien ce lundi. Suivant les pas de Cesaria Evora, elle veut juste être Lucibela…

Ave Cesaria ! Comme le chantait Stromae, qui va au Cap-Vert salue forcément le fantôme de la diva aux pieds nus, héroïne nationale dont l’effigie frappe les billets de mille escudos. Plus que n’importe quel homme d’État, elle a fait connaître son Petit Pays à l’extérieur. Difficile, donc de l’oublier, même si on a pu se rendre compte, grâce aux portes qu’elle a ouvertes, que l’archipel regorgeait d’une foule de talents qui ne demandaient qu’à être entendus. Sara Tavares, Lura, Elida Almeida… chacune avec son style a brillé à l’extérieur. Mais depuis la mort de Cize (le petit nom de Cesaria), rares sont les chanteuses qui s’aventuraient à suivre avec constance les sentiers de la morna et de la coladera qu’empruntaient avec grâce la diva. Avait-elle écrasé ces styles de tout son poids, comme une statue du commandeur intimidant la succession ? Fallait-il un temps de deuil avant que n’émerge, un beau matin, une autre voix de la morna ?

En tout cas, dès 2017, le public et les professionnels qui ont découvert Lucibela lors de l’Atlantic Music Expo de Praia, la capitale du Cap-Vert, en ont été retournés.
Touchante de simplicité et de sincérité, la voix de Lucibela avait envoûté, le temps d’un showcase, les oreilles de ceux qui avaient la sodade de la sodade.

La jeune femme est née à Tarrafal, au nord de l’île de Santiago. Une ville de garnison célèbre pour le pénitencier qui au temps colonial renfermait les prisonniers politiques. C’est aussi là qu’est né le chanteur et poète Mario Lucio, cousin cap-verdien de Gilberto Gil qui, comme lui, s’est essayé non sans succès au métier de ministre de la culture. Mais revenons à Lucibela, dont la famille quitte Tarrafal pour l’île de Sao Vicente, capitale Mindelo. La ville de Cesaria. C’est là que gamine déjà, elle apprend à chanter en écoutant la radio, mais aussi sa mère, qui aime emplir la maison de mornas et de coladeiras. C’est d’ailleurs adolescente que Lucibela se concentre sur ces musiques qu’elle dit « traditionnelles ». Et elle se met à les chanter en public au lycée, accompagnée par un groupe de copains. Elle se souvient : c’était en terminale, et la première chanson qu’elle entonna sur scène fut ‘Nutridinha, qu’interprétait à l’époque Cesaria.

« Il y a eu une Cesaria, et il n’y en aura jamais qu’une seule. Mais j’aimerais pérenniser ces genres musicaux. Je vais continuer, et j’espère qu’on m’acceptera… moi je veux juste être Lucibela. »

Et puis avec son groupe, ce sont les bars et les restaurants de Sal et de Boa Vista, deux îles réputées pour leurs plages et leurs touristes. Elle fait des reprises et commence à développer son propre répertoire,  rode sa voix et prend de la bouteille sur scène. José da Silva, producteur et manager de Cesaria, immanquablement la repère, et l’envoie terminer ses classe dans les cabarets lisboètes. Cesaria aussi était passé par là. Mais la comparaison s’arrête là : « il y a eu une Cesaria, dit-elle, et il n’y en aura jamais qu’une seule. Mais j’aimerais pérenniser ces genres musicaux. Je vais continuer, et j’espère qu’on m’acceptera… moi je veux juste être Lucibela. »

Comme tant de femmes au Cap-Vert, terre dont s’envolent les hommes-migrateurs, elle élève sa fille seule, lui réservant sans doute la primeur de ses mornas déchirantes, morceaux de soleil pleurant avec le ciel. Car Lucibela a la voix pour cela : une fond de sublime tristesse, un fêlure qui la rend fragile et immanquablement présente sur scène. Avec tout ça, il fallait bien qu’elle entre un jour en studio. À Lisbonne, en novembre 2017, elle enregistre les treize morceaux d’un album parfois un peu poli, où elle chante avec bonheur la fugue d’une fille quittant la maison pour rejoindre son amour et qui, comme Cendrillon, voit sonner l’heure du retour à la maison (Stapora do Diabo). Ou encore son attachement pour les dix îles de l’Archipel (Mi e doda na bô Cabo Verde) auquel la musique relie tous les Cap-Verdiens partis en aventure, comme un cordon ombilical. Laço umbilical, c’est le nom du premier album de Lucibela.

À écouter, et mieux encore, à découvrir sur scène à Paris, le 12 février, dans le cadre du Festival Au Fil des Voix.

(c) Youri Lenquette

Lire ensuite : Radyo Siwèl : quand Mélissa Laveaux renoue avec ses racines haïtiennes

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