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The Pan African Music Magazine
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Rap : 10 titres et un tour d’Afrique (1er trimestre 2022)

Du Kenya au Rwanda en passant par le Togo, le Maroc et l’Egypte, PAM vous propose une sélection de dix morceaux qui ont secoué la planète rap africaine au cours du premier trimestre 2022.

 

Une sélection à retrouver dans notre playlist Pan African Rap !

Small X –  « Price » (prod. Yo Asel et MW) 

Maroc

On commence très fort notre tour avec Small X. Le rappeur marocain s’est fait connaître au sein du duo Shayfeen. L’an dernier, il a pris son envol en solo en sortant l’album Phoenix. Il vient de marquer le mois de mars avec la sortie de « Price », un titre avec un côté old school et coproduit par les beatmakers marocains Yo Asel et MW. «Dans cette chanson, je dis que le prix d’aujourd’hui n’est plus celui d’hier. Je parle de mon évolution, des situations que j’ai vécues, de ma philosophie, de comment je réfléchis, nous a-t-il confié. Je dis aussi que je ne suis pas simplement un rappeur, je suis un artiste hip-hop ». Pour le clip en noir et blanc de « Price », Small X a travaillé avec son ami, le réalisateur Idlane, qui avait déjà œuvré sur la vidéo de « XXL » en 2021. On y voit des jeunes, avec des cordes de pendu autour du cou, monter dans un camion sur lequel on retrouve le logo de l’artiste qui figurait sur la pochette de Phoenix.

« Ça représente le stress, la pression que ressentent les jeunes en Afrique face au futur. Je viens avec un camion et c’est comme un espace artistique que j’apporte. J’emmène les gens dans mon univers, et je leur enlève les cordes dans le camion. L’art, la musique, c’est le seul espace où les gens peuvent être libres. Avec les acteurs qui sont dans le clip, j’ai voulu donner une image des jeunes Marocains d’aujourd’hui. Il y a plein de gens stylés au Maroc ». Ce nouveau single a évidemment plu à un large public et la vidéo a rapidement dépassé le million de vues sur YouTube. 

Mc Artisan feat. Didine Canon 16 – « Glock » ( Prod. Croww & Exyth)

Algérie 

On reste au Maghreb. Personne n’en parle, mais la scène rap algérienne est l’une des plus bouillonnantes du continent. Le titre de drill intitulé « Glock » qui réunit les rappeurs Mc Artisan et Didine Canon 16 est en train de battre tous les records. Le clip du morceau, sorti début mars, a dépassé les 20 millions de vues en trois semaines. Pas étonnant quand on connaît la popularité de ces deux artistes en Algérie.  Mc Artisan est un rappeur âgé de 33 ans et originaire de Souk-Ahras, dans l’est du pays. Il s’est hissé tout en haut du game depuis 2015 grâce à « I.D.G.A.F. », « Fairytale » ou plus récemment avec « Redlights ».

De son côté, Didine Canon 16 est un rappeur et acteur très connu, lui aussi depuis le milieu des années 2010, grâce en partie à la dimension politique et sociale de ses textes. Ce qui fait aussi le succès de cette rencontre au sommet, c’est le refrain imparable de « Glock ». On vous prévient, vous allez l’avoir dans la tête pour un moment ! 

Black Hoodie Club –  « TGV » (prod. Johnsix et Kiev Beats)

Tunisie

On part maintenant en direction de Tunis à la rencontre d’un nouveau crew qui fait beaucoup parler de lui depuis un an. Le Black Hoodie Club rassemble les rappeurs 4lfa, Ta9chira, Brotherhood et le producteur Johnsix. « On partage les mêmes principes et objectifs, la même direction artistique, nous explique Brotherhood, rappeur de 24 ans, originaire de la ville de Kasserine. Mais ce qui nous rassemble dépasse largement la musique. Dans notre quotidien, on passe beaucoup de temps ensemble, et c’est de ça que vient notre inspiration ». Ce collectif a sorti l’an dernier un premier album intitulé Rise of a Gang, avec un beau succès à la clé, et se démarque grâce à une esthétique alternative et arty, à l’image du clip de la chanson « Requin » (une référence à la fameuse basket devenue emblème de la street culture).

Le morceau « TGV » est un titre de drill expérimentale sur lequel on retrouve 4lfa, Brotherhood et Ta9chira. « On a appelé ce morceau comme ça parce que nous estimons que nous sommes loin artistiquement par rapport à ce qu’on voit sur le marché, précise Brotherhood. Cette chanson, c’est pas mal d’égotrip et de sarcasme. C’est un morceau très chaud. Par exemple, je pense que Ta9chira fait partie de l’élite du rap tunisien. On peut le considérer comme un écrivain, pas seulement comme un rappeur, il a son propre vocabulaire ». Si vous ne connaissez pas encore le rap tunisien, le Black Hoodie Club, c’est la meilleure porte d’entrée pour le découvrir. 

Marwan Pablo « Barbary »  (prod. Hany Moamer) 

Egypte

L’Égypte rayonne aussi depuis quelques années grâce à sa trap futuriste et vaporeuse. Marwan Pablo est l’un des principaux représentants, voire le parrain, de cette scène. Après un an de silence suite à la sortie de l’EP CTRL, le rappeur d’Alexandrie est de retour avec « Barbary ». Ce nouveau morceau a été produit par Hady Moaner, un jeune beatmaker de Louxor, également connu sous le pseudonyme de Jean Blue, et qui s’est fait remarquer récemment en travaillant avec les rappeurs américains Drake (« Pipe Down ») et J.Cole (« Heaven’s EP »). Sur une production qui reprend des éléments rythmiques de la musique populaire égyptienne « mahraganat », le rappeur parle de son statut de leader du rap égyptien et se compare à un barbare dans une arène. Le clip de la chanson, signé par le collectif cairote Nakad, est conceptuel : l’action se déroule autour d’un bolide allemand dans un décor qui se transforme grâce à des projections au plafond et sur les murs. L’autre titre égyptien qu’il ne fallait pas rater en ce début d’année, c’est « El Bakht » du rappeur Wegz. 

Big Yasa feat. Kombat – « Mazza » (prod. Amari)

Kenya

À Nairobi, les rappeurs mélangent à merveille l’argot baptisé « sheng » aux codes britanniques de la drill, dans le sillage du groupe Buruklyn Boyz. Parmi ceux-là, on trouve Big Yasa, un rappeur de 21 ans, membre du crew Madclan et qui vient de Kibera, le gigantesque ghetto qui borde la capitale. Depuis un an, sa cote de popularité ne cesse de croître grâce à des titres en solo (« Cold ») ou en bande, avec les Buruklyn Boyz ( « Bad Boyz Club ») ou le Spoiler Gang ( « Smart Kwa Street »). Pour son dernier single, « Mazza », Big Yasa s’est associé au rappeur portugais Kombat. Cet artiste a vécu à Londres plusieurs années (ça s’entend dans son flow),  et y a rencontré de nombreux rappeurs d’origine africaine, d’où ce featuring. La production du morceau a été signée par Amari, basé en Suède, et comporte un sample de polyphonie bulgare. Une collaboration internationale en somme. 

Bushali – « Kivuruga » (prod. Ghanaian Stallion)

Rwanda

Au Rwanda, les rappeurs mélangent la poésie de la langue kinyarwanda aux sonorités de la trap, et ça donne le genre qu’on appelle la kinyatrap. Les principaux représentants de cette scène sont Ish Kevin, B-Threy ou encore Bushali. Ce dernier est l’un des pionniers de ce mouvement à Kigali, et a sorti en 2021 l’EP Kivuruga, dans lequel il évoque avec vulnérabilité les challenges personnels qu’il rencontre en évoluant dans l’industrie musicale en tant que rappeur, mais aussi les difficultés que subissent les jeunes de son pays. L’ensemble de ce projet a été produit par le producteur germano-ghanéen Ghanaian Stallion, que Bushali a rencontré lors d’un concert dans la capitale rwandaise, et explore différents styles (hip-hop, afrobeats, trap, highlife).

Le morceau intitulé « Kivuruga », qui ouvre l’EP, s’inscrit dans ce que l’on pourrait qualifier de « kinyadrill ». Bushali y parle des héros du quotidien. « Il y a des gens dans le monde qui ont accompli des choses et qu’on appelle des héros, explique-t-il. Je dirais que chacun est un héros lorsqu’il se sent concerné par ce qu’il fait et qu’il peut être un modèle pour les autres et les motiver. Nous sommes tous spéciaux à un moment donné ». À l’image des paroles, le clip a été tourné au milieu de la jeunesse et de travailleurs qui taillent la canne à sucre ou recyclent des pneus en caoutchouc. 

Dope Saint Jude –  « Home »  

Afrique du Sud

Catherine Saint Jude Pretorius alias Dope Saint Jude est originaire de Cape Town. Après avoir étudié les sciences politiques et fondé en 2011 le premier collectif drag-king d’Afrique du Sud, cette militante féministe a étudié la production sonore et sorti son premier projet solo Reimagine en 2016. Son deuxième EP, Resilient, sorti en 2018 et enregistré à Londres, avait été l’occasion pour elle d’aborder des thèmes comme l’égalité sociale, raciale et sexuelle. « Home » est le premier single de Higher Self, son prochain EP à venir, un projet introspectif écrit en pleine pandémie à Londres.

C’est une chanson en forme de déclaration d’amour, à mi-chemin entre rap et r&b, et qui porte sur « la recherche d’un lieu de réconfort dans l’étreinte d’un(e) amant(e) ». Le clip questionne le corps de la femme -en l’occurrence de deux femmes- dans le monde de l’image, et célèbre le couple que la rappeuse forme avec sa femme Roxanne. La couleur rouge qui évoque la passion est très présente, et le stylisme de la vidéo s’inspire en partie de l’esthétique BDSM. 

Sory L’Officier – « Poco A Poko » (prod. Momo Beatz) 

Sénégal

En février dernier, les Lions de la Teranga ont remporté pour la première fois la Coupe d’Afrique des nations de football. Mais est-ce que le Sénégal est aussi le champion du continent au niveau du rap ? C’est bien probable. En tout cas, c’est le pays africain qui a su le mieux s’approprier la nouvelle tendance du hip-hop, la drill, en y ajoutant des percussions traditionnelles comme le tambour tama, en la mélangeant au mbalax national et en s’inspirant des différentes cultures sénégalaises. Le crew emblématique de ce nouveau mouvement, c’est le Akatsuki SN, originaire du quartier des Parcelles Assainies à Dakar. Ses membres (Talla BTB, LMN Xél Niar, Xhalil, et Sory L’Officier) ont conquis le public sénégalais grâce au  tube « Weredi » et à l’album P.A. Universal. Mais les rappeurs du groupe savent aussi se débrouiller en solo, la preuve avec « Poco A PoKo » de Sory L’Officier.

Pour ce nouvel exemple parfait de drill galsen (la production est signée par Momo Beatz), le rappeur a décidé de parler de la façon dont il construit sa carrière petit à petit. Dans le clip qui a été tourné avec les enfants de son quartier, il a choisi de mettre en valeur la culture de l’ethnie diola, qui représente la majorité de la population de la Casamance, dans le sud du pays. Parmi les symboles de cette culture, on trouve les machettes diassi. Mais surtout, le rappeur est entouré des sisal kankourang, des masques d’initiation entièrement recouverts de fibres d’agave, et qui jouent le rôle de protecteurs dans les villages mandingues au Sénégal et en Gambie. La couleur orange et la nature ondoyante de ces fibres créent un vrai choc visuel. 

Ghettovi feat. Writing Écriture – « Chapeau noir »  

Togo

Au Togo aussi, la drill fait du bruit à travers une nouvelle génération d’artistes (Folidjanta, Beatpovelo, Lomérica Gang ou Conii Gangster) qui s’est emparé de ce nouveau son. De son côté, Ghettovi se met lui aussi à la drill mais il n’est pas né de la dernière pluie. Âgé de 33 ans et originaire d’Atakpamé, la ville aux sept collines, il est l’un des meilleurs rappeurs du pays. Il rappe en langue mina et a su s’’imposer dans un style hardcore. Il se surnomme le « Vodou King ». « Ce surnom, c’est parce que je suis animiste à 100%, nous a-t-il précisé. Je respecte mes ancêtres et je suis fidèle à la culture et aux traditions africaines ».

Cet attachement au culte vaudou, on le retrouve tout particulièrement dans le titre « Chapeau Noir » en collaboration avec son compère Writing Écriture. « J’ai fait cette chanson pour honorer nos divinités et nos ancêtres. Le titre fait référence à un film nigérian dans lequel si le chapeau se pose sur ta tête, c’est ta fin qui a sonné. C’est juste pour dire à nos persécuteurs de faire attention à nous ». Le morceau commence par une incantation et Ghettovi évoque entre autres le dieu du tonnerre et l’esprit de la mer. Dans le clip tourné dans un petit village appelé Dikame, on assiste à une cérémonie vaudou. La démarche artistique du rappeur togolais est comparable à celle du clip de  « Y3 Y3 Dom » dans lequel le Ghanéen Jay Bahd se faisait bénir par un sorcier ashanti avant de partir en guerre. 

Pappy Kojo  feat. O’Kenneth et Reggie – « Koobi » (prod. Skonti) 

Ghana

Tiens, puisque l’on parle du Ghana, finissons notre tour par ce pays. La scène rap et drill de la ville de Kumasi est en pleine explosion depuis un peu plus d’un an avec des figures comme Jay Bahd, Yaw Tog, et plus récemment Black Sherif. Pour sa part, Pappy Kojo, originaire de la ville côtière de Takoradi, s’est fait un nom en tant que rappeur et amuseur au Ghana dès 2014 et a sorti Logos 2, son premier album l’an dernier. « Koobi » est un extrait de son du nouvel EP Logos Hope. Ce titre est le nom d’un plat ghanéen de poisson séché et salé, mais il s’agit très vraisemblablement ici d’une métaphore pour le cannabis. Pour ce morceau, celui que l’on surnomme Fante Van Damme a invité les rappeurs O’Kenneth et Reggie, deux des éléments les plus chauds de Life Living records, le label de Kumasi au cœur de ce nouveau son drill à la sauce ashanti qu’on appelle l’asakaa. Première bonne nouvelle : Pappy Kojo est bien de retour.

Son flow est tranchant. Dans la première partie du clip, tournée dans les rues d’Amsterdam aux Pays-Bas, le rappeur semble se moquer quelque peu de l’esthétique visuelle de la drill britannique, en portant une cagoule mal ajustée, par-dessus un costume de ville et en arborant une grosse moustache. Ensuite, on se retrouve, sans vraiment de transition, dans un décor plus rugueux, dans une sorte de casse au milieu d’une forêt ghanéenne, pour les couplets d’O’Kenneth puis Reggie. Deuxième bonne nouvelle : la scène de Kumasi a de longs jours devant elle, si l’on en croit l’énorme talent de ces deux rappeurs. 

Une sélection à retrouver dans notre playlist Pan African Rap sur Spotify et Deezer.

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