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Flying Lotus, tout feu tout flamme

Avec Flamagra, le pionnier de la bass music made in Los Angeles signe un retour discographique à l’opulence maîtrisée, entre performances solos ardentes et collaborations fusionnelles.

Crédit Photo: Presse / Renata Raksha

Sur le papier, 2019 ressemble définitivement à une grande année pour la musique électronique. En moins d’un semestre se sont succédés les come-backs des mastodontes du genre : des Chemical Brothers en pleine forme, le virtuose James Blake avec une sortie surprenante, des livraisons timides des tant attendus Apparat et Amon Tobin, ou un duo Modeselektor à bout de souffle. C’était sans compter sur Flying Lotus qui, même après six albums, ne déçoit jamais et fascine toujours autant les mélomanes de tous bords.

En cinq ans, l’eau a eu le temps de couler sous les ponts. Occupé à écrire des bandes-originales pour des courts-métrages, à produire d’autres artistes comme Kendrick Lamar, ou à célébrer les 10 ans de son label Brainfeeder, il n’en a pas pour autant oublié les fondements de son art, ni son devoir de maintenir une réputation de maître contemporain de la bass music au sens large. Douze ans après son premier EP Reset, Flamagra montre une fois de plus que Steven Ellison s’inscrit continuellement dans le futur qu’il a lui-même écrit au fil des sorties, en exploitant – après celle de la mort dans son album You’re dead – la thématique du feu à travers 27 titres denses qui oublient les lois de la physique. A la suite d’un cinquième album relativement difficile d’accès, nous aurions pu nous attendre à un nouvel essai encore plus cérébral, au risque d’obtenir une bouillie expérimentale que seul l’artiste aurait pu interpréter. Plutôt que de tomber dans ce piège typique du surdoué, Ellison offre un album copieux dans lequel on retrouve distinctement les piliers sonores qui ont façonné sa musique depuis le début.


Ainsi, même si Flamagra ne vient pas révolutionner la discographie de l’américain, il sonne comme le répertoire d’idée d’un génie qui essaierait de donner vie à chacune de ses pensées. Si on oublie quelques tentatives un poil confuses (« Capillaries, « Pilgrim side eye »), Flying Lotus ne laisse aucune place à l’ennui en privilégiant les schémas courts pour mieux conquérir son auditoire. Ainsi, l’album bénéficie une fois de plus d’un énorme travail sur le beat qui, malgré l’aspect compact qui le caractérise, laisse généreusement filtrer des salves mélodiques cosmiques, à l’image de l’onirique « Post requisite », de l’abstract hip-hop aérien de « Andromeda » ou du piano féerique du trop court « FF4 ».

Flamagra brille aussi par son aptitude à laisser une place de choix à des envolées jazz au milieu des arrangements électro organiques, à tel point qu’on en oublie parfois la domination des machines. Rappelons-le, Steven Ellison est suspendu depuis sa naissance à un arbre généalogique piqué par la musique, avec la pianiste de jazz Alice Coltrane comme grand-tante -elle-même épouse de John Coltrane- et une grand-mère compositrice au service de la Motown, qui expérimentait déjà sur des drums machines dans la maison familiale. Et plus Flying Lotus avance dans sa carrière, plus cet environnement déteint sur son travail, un constat confirmé par le jazz uptempo de « Heroes in a half shell », l’énergie funk positive et sophistiquée de « Takashi » qui oscille entre Squarepusher et Funkadelic, l’alambiqué et jubilatoire « Inside your home », ou « Say something » et son jeu de cordes en noir et blanc qui fait paradoxalement figure d’alien au milieu de ce bouquet garni jazzy futuriste construit en grande partie avec la complicité de son acolyte de toujours, le bassiste et chanteur Thundercat.


Car c’est là aussi, sur des collaborations passionnantes, que l’on attendait Flying Lotus. Peu d’artistes électros peuvent se vanter de pouvoir se payer des featurings qui s’appellent Thom Yorke ou Erykah Badu. Parfaitement équilibré, l’album accueille ici et là de nouveaux chanteurs et MCs venus s’approprier les instrumentations d’Ellison comme s’il s’agissait à la fois d’un challenge et du matelas idéal pour poser leur voix. Parmi les titres les plus remarquables, la sensation Anderson .Paak s’en donne alors à cœur joie sur « More », certainement son meilleur morceau depuis l’album qui l’a révélé en 2016. Plus tard, le ciel s’assombrit avec le rap obscur de Denzel Curry, et Solange donne une couleur soul sensuelle à « Land of honey » pendant que le charisme de David Lynch opère sur « Fire is coming », morceau ensorcelant au carrefour du spoken-word et de la techno crispée. Aux côtés de Thierra Wack, Little Dragon, Shabazz Palaces ou Toro Y Moi, la meilleure surprise vient du vieux bandit George Clinton qui, très tôt dans l’album, soulève les tripes avec le funk dérangeant de « Burning down the house ».

Producteur incontournable et figure essentielle dans l’histoire de la musique électronique, Flying Lotus donne du relief à ses compositions, dessinant ses textures en trois dimensions et offrant des sensations toujours inédites au sein une scène électro qui ne demande qu’à se renouveler.

Écoutez Flamagra sur Spotify, Deezer et Apple Music.

Lire ensuite : Leçon d’enjaillement avec le collectif Moonshine à Paris

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